Univers de fées – Michel Leutcha

 

                                                                              I

 

Les fées jaillissent des ondes de liesses et romancent l’amour assis au trône des lingots d’or. Elles brodent la parole moderne avide de diamants et de perles. Aux oreilles pendent des roues en argent. Les pieds les jambes et les bras sont des jalons de pierreries. Ici les savantes fées flairent l’horizon des hommes bourrés de fric. Fées du siècle. Fées aux indécences couronnées. Fées aux plaisirs sensuels courtisés par tout l’univers.

Les fées sont extraordinairement accolées à notre existence. Elles aiment le plaisir et offrent le plaisir. Plaisir des lèvres. Plaisir de l’entre-jambes. Plaisir savouré au prix de l’or. Elles vont et viennent dans la cité des hommes. Offrant en public le plaisir sans mesure ni retenue. Logées dans les cabarets bruyants aux murs arc-en-ciel des cités urbaines. Le plaisir a en toutes saisons ses grades et ses échelons.

Les fées des plaisirs du vin trônent au rez-de-chaussée. Les fées des solidarités vautrées dans la volupté au premier étage. Et les fées des ivresses pornographiques tiennent la tour de contrôle des existences contemporaines. Le plaisir du vin est en honneur. Il est roi et règne sur le berceau des vivants. Fœtus nourris de vin. Bébés au lait mêlé de vin. Adolescents suçant des sachets de vin dans les toilettes ou les broussailles. Jeunesse esclave du vin. Vieillesse ruinée par la succulence du vin.  Morts pleurés au milieu des casiers de vin. L’avenir du vin et des plaisirs de la chair est tout en fleurs. Le vin au sommet de l’économie mondiale chante les beaux jours des producteurs et brûle à petit feu les poumons des vivants qui valident la ruine des jeunes graines de l’avenir. La tombe assise en reine ne perd rien à attendre. Son jour de noce va bientôt sonner !

 

                                                                          II

            Le vin a ses grandes messes. Ses fêtes foraines. Ses banquets annuels. Il a ses pauvres mecs le vin. Et ses puissants riches.  Ses collabos et ses défenseurs. Le vin a ses maîtres et ses esclaves. Ses grandeurs et ses splendeurs. Ses féeries et ses fastes misères. Le vin déploie ses féeries ses grandes féeries. Pomponnées par des tonnerres publicitaires. Vivifiées par l’orgueil des communautés envoûtées par le virus de l’alcool. C’est à vrai dire de grandes féeries en marche sur la terre. Féeries qui n’ont ni cœur ni âme ni oreilles ni raison. C’est de grandes féeries jouant leurs drames comiques aux carrefours de l’univers. Des féeries ouvrant aux valeurs humaines le succulent poison de la vie qui se ruine. Le vin doux de l’ivresse des sublimes valeurs entraîne dans ses abîmes mousseux le fils la fille le père la mère. Le vin traîne la famille au gibet de l’avenir. Les vertus même se saoulent de vin pour continuer à exister !  Au trône du monde les fées le plaisir et le vin gouvernent les destinées en ascension lente pour  défaire les glorieuses lumières.

 

                                                                                                        Ndoungué 04-03-1985

 

 

 

 

 

 

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