Paulette dite Tata Popo : Un coeur, des sous et des des soucis (quatrième partie) – Autobio Tome XLV – Jean-Marie Audrain

XLV – Paulette dite Tata Popo : Un coeur, des sous et des des soucis (quatrième partie)

Une fois mon grand-père Georges décédé, ma grand mère Marguerite n’avait plus guère envie de passer les six beaux mois de l’année dans sa grande maison de Mussy sur Seine, ne serait-ce que parce qu’elle avait été bâtie des mains de feu son époux. Le premier été après son grand départ, ma grand-mère et tata Popo se trouvaient encore dans la bâtisse familiale sise rue du Sac.

Un inconnu frappa à la porte et se présentant comme un délégué de la commission travaux-voirie de la mairie qui s’apprêtait à élargir l’avenue Victor Hugo afin de laisser passer les gros camions. Or la maison faisant angle entre la rue du Sac et l’avenue Victor Hugo, celle-ci était frappée d’alignement. La mairie avait fait évaluer l’ensemble, bâtiment d’habitation, remise, cour avec maisonnette et deux caves à vins, pour la somme de 8 millions de Francs et lui proposerait une indemnisation réglementaire alignée sous la moitié de la valeur du bien. Cette annonce chamboula grandement la mère et la fille. Quelques jours plus tard, ce monsieur revint frapper à la porte et se présenta comme bienfaiteur. Ce monsieur Lachal avait perçu combien se défaire d’une telle belle et grande maison pour la voir détruite quasiment sous leurs yeux les attristaient, aussi leur fit-il une proposition gagnant-gagnant : il leur proposait d’acheter la maison un million de plus que ce que proposerait la mairie afin de l’occuper jusqu’à sa démolition programmée l’année suivante. Ma grand-mère hésitait, mais tata Popo dut voir en ce monsieur Lachal un ami car elle l’encouragea à valider sa proposition. En peu de temps ce monsieur occupait la maison, presque entièrement laissée telle quelle : meubles dans les deux étages habitables, vins et champagnes millésimés dans les caves etc. Un mois plus tard, ce monsieur appela ma grand-mère pour lui signaler que son toit prenait l’eau et demandait le remboursement d’un million sous peine de l’attaquer pour vente avec vice caché. Il lui envoya parallèlement une lettre commandée avec une photo de prise d’eau à l’endroit d’une tuile manquante. Tata Popo l’incita à céder pour que la réputation de la famille ne s’en trouve pas entachée dans le village. Mes parents et moi-même dirent à ma grand-mère qu’un bien vendu l’était en l’état et que cette photo de tuile manquante nous semblait suspecte. Tata Popo grimaça tant que ma mère dit à la sienne : “Il faut envoyer un chèque d’un million sinon Popo va pleurer“. L’affaire se sut dans tout Mussy et nous remonta aux oreilles que ce monsieur Lachal avait ôté une tuile de la toiture et versé de l’eau avec un arrosoir sous le yeux de tous les voisins, ne cachant pas qu’il voulait faire croire à un sinistre et demander un dédommagement. Quand ma famille est retournée à Mussy, tout le monde lui a ri au nez au sujet de cette duperie vraiment trop grosse.

Cousine Babeth dans la cour de la rue du sac

Mes parents souhaitaient faire construire une petite maison à Mussy à l’écart du centre-ville. Un terrain fut vite repéré et acheté, avec vue sur les vaches de l’autre côté de de la rue. Apprenant ce projet, tata Popo vient leur dire qu’elle avait reçu une proposition en or pour donner au projet familial. Tous les midis elle mangeait au restaurant avec le “célèbre” Georges Zaïtzeff, promoteur immobilier travaillant à l’agence jouxtant le restaurant. Celui-ci pouvait avoir des prix sur les constructions. Il suffisait que mon père lui verse un acompte afin d’acquérir la maison de ses rêves à un prix imbattable. Mon père désirait rencontrer ce monsieur car, étonnamment, il réclamait comme acompte 4 millions. Nous apprîmes par la suite que tata Popo lui avait raconté toute l’histoire de la rue du sac. Tata popo s’offusqua qu’on ne lui fasse pas confiance, aussi ma mère dit-elle à mon père : « Maurice, tu vas faire pleureur Paulette, fais-lui un chèque de 4 millions sans discuter ». Dieu voulant ce que femme veut, mon père rassembla les économies de la famille sur un compte courant et signa un chèque à l’ordre de Georges Zaïtzeff qui, en retour, lui donna les coordonnées de l’entrepreneur qu’il avait mandaté pour construire la maison selon le plan qu’il avait donné à tata Popo. Les semaines passèrent, sans nouvelles, ni de Georges Zaïtzeff ni de l’entrepreneur. Au bout d’un mois, mon père demanda à tata Popo de questionner ce dernier afin d’apprendre ce qui se passait. Tata Popo ne répondant qu’évasivement, mon père s’est rendu à l’agence immobilière où prétendait travailler à un poste de responsable ce monsieur Georges Zaïtzeff. Il fut reçu par la directrice de l’agence qui lui révéla que Georges Zaïtzeff n’était qu’un visiteur se servant de l’agence comme bureau de rendez-vous. D’ailleurs celui-ci n’était plus reparu depuis… un mois.

Paulette la pin-up de Mussy

Mon père contacta le service judiciaire municipal qui mena enquête : Georges Zaïtzeff était un escroc international recherché par Interpol suite à une plainte d’usurpation d’identité et d’escroquerie lancée depuis la Russie, son pays d’origine. Il était financièrement insolvable car son compte en banque demeurait en permanence à découvert, tout l’argent volé étant placé sur les comptes d’épargne de sa concubine avec laquelle n’existait aucun lien de droit officiel. En un mot, il était intouchable ! L’entrepreneur s’en prit à mon père car Georges Zaïtzef lui avait fait engager des frais et même commandé un chantier de construction. Mon père dut se bagarrer avec ce monsieur qui était à la fois complice et prêt à faire amende honorable moyennant financement de son chantier.

Finalement une petite maison fut construite sur le terrain récemment acquis. Le premier soir, mon père gara sa 404 bordeaux devant la maison. Le lendemain matin, nous la retrouvions recouverte d’un centimètre de copeaux blancs : la maison se trouvait sur un terrain invendable car situé sur la ligne d’évacuation des déchets de l’usine Régnier, devenue Société Parker, qui fabriquait des planches de contre-plaqué et éliminait jour et nuit ses copeaux par d’immenses cheminées.

De Mussy, je n’ai gardé que des souvenirs de la maison de mes grands-parents avec, ici et là, le visage de ma cousine Babeth avec qui je suis toujours dans les meilleurs relations. Il n’y a pas à dire, une cousine vaut mieux que tous les amis du monde…de tata Popo !

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Jean-Marie Audrain

Jean-Marie Audrain (509)

Né d'un père photographe et musicien et d'une mère poètesse, Jean-Marie Audrain s'est mis à écrire des poèmes et des chansons dès qu'il sut aligner 3 mots sur un buvard puis trois accords sur un instrument (piano ou guitare). À 8 ans, il rentre au Conservatoire pour étoffer sa formation musicale.
Après un bac littéraire, Jean-Marie suit un double cursus de musicologie et de philosophie à la Sorbonne.
Il se met à écrire, dès cette époque, des textes qui lui valurent la réputation d’un homme doublement spirituel passant allègrement d’un genre humoristique à un genre mystique. D’ailleurs, il reçut de la SPAF (Société des Poètes et Artistes de France) un grand diplôme d’honneur en ces deux catégories.
Dans ses sources d’inspiration, on pourrait citer La Fontaine, Brassens et Devos.
Lors de la naissance du net, il se prit à aimer relever les défis avec le site Fulgures : il s’agissait de créer et publier au quotidien un texte sur un thème imposé, extrêmement limité en nombre de caractères. Par la suite il participa à quelques concours, souvent internationaux, et fut élu Grand Auteur par les plumes du site WorldWordWoo ! .
Il aime également tous les partenariats, composant des musiques sur des textes d’amis ou des paroles sur des musiques orphelines. Ses œuvres se déclinent sur une douzaine de blogs répartis par thème : poésie, philosophie, humour, spiritualité…sans oublier les Ebulitions de Jeanmarime (son nom de plume). Un autre pseudo donna le nom à son blog de poésies illustrées : http://jm-petit-prince.over-blog.com/
Pendant longtemps il a refusé de graver des CD et d’imprimer ses œuvres sur papier, étant un adepte du principe d’impermanence et méfiant envers tout ce qui est commercial.
Si vous ne retenez qu’une chose de lui, c’est que c’est une âme partageuse et disponible.

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2 Commentaires
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Grant Marielle
Invité
25 décembre 2020 16 h 05 min

On ne peut qu’éprouver de la sympathie pour cette famille honnête accablée de malchances financières à cause de filous de la pire espèce !