territoires oubliés – Georges Cambon

Comme il est réconfortant de glisser dans des habits d’ombre, nous n’écoutons plus, ce qui frémit en nous! Le mot AMOUR nous effraie, nous le croyons chargé de malheur, nous n’aimons plus, nous demandons  à notre solitude le devoir de nous protéger.

Elle est terrible cette société qui renvoie à nos faiblesses, mais l’homme faible exulte parmi des décombres sciemment dressées!

Trop de blessures nous ont appris le pourquoi et le comment des choses, nous dessinons sur le givre des cœurs usés, petits sarments de vigne qu’il va falloir brûler, mais je nourris une plus insupportable responsabilité, celle de pouvoir et de ne plus vouloir!

Pourquoi dépasserions-nous un territoire connu? Tout favorise la naissance de soi dans un périmètre ordonné, nous trouvons des excuses à notre désengagement, sans nul doute valables. Dans la nuit, il n’y a pas de péril, hormis l’imprévisible. C’est cela qui effraie, l’imprévisible, dont il s’avère impossible de mesurer la hauteur et la longueur-espace dévolu à des puissances supérieures à soi-! L’homme dompte sa docilité. Il n’y a pas de mérites à cela, jamais il atteint les territoires inoccupés…

Attendre! Il y a dans l’attente trop de barbelés, trop de miradors pour que nous fassions, dans l’attente, un pas. Tourner en rond équivaut à partir d’un rond important pour atteindre un rond minuscule.. A la fin du désamour, nous éprouvons une glaciation du sentiment. Rien ne semble pire pourtant que d’admettre notre responsabilité dans une rupture, il est rare de partager les torts.

L’éloignement passager est en fait un rapprochement, mais nous ne comprenons pas, la fuite de l’autre. Deux êtres qui s’aiment peuvent-ils être éternellement liés? Nous ne mesurons pas cela. C’est angoissant de devoir définir l’échec, nous préférons approfondir l’échec de l’autre!

Vivre l’instant est complexe, goûter le moment présent requiert une forte amnésie. Hier importe si peu que j’efface le souvenir, mais le passé est glouton, nous ne l’ignorons pas, nous nous en accommodons!

      Nous ne souffrons pas de nos infirmités, nous souffrons des infirmités que les autres aperçoivent en nous. Ils ne distinguent pas la beauté, ils s’apitoient sur la laideur, ils compatissent sur les blessures, ils font éclore des malheurs que nous pensions innocemment reclus au plus profond de notre être!

    Pourquoi parleraient-ils de nos qualités? Ils les jugent absentes, nous pourrions leur renvoyer haine et méchanceté, nous pourrions sortir les griffes ou mordre dans la chair, rageusement. L’homme n’aime pas l’homme, il le déteste, il s’incline dévotement devant l’artiste au chef d’œuvre reconnu, mais il passe sa vie à tenter d’abattre l’autre, comme si cet autre était l’ennemi déclaré, la source de tous les maux. L’homme existe par rapport à l’autre, aussi perd-il son point d’équilibre qui reste “lui” envers et contre tous!

L’amour ne survit pas à l’habitude, il s’endort dans le quotidien, il devient un objet parmi d’autres objets. J’ai toujours aimé chez une femme, le silence, puisque le silence est peuplé de ce qu’elle n’ose pas dire. Seul un artiste peut traduire de tels instants, il sait pertinemment qu’il y a à la fois du reproche et du désir ‘le reproche de ne pas avoir été comprise et le désir de ne pas avoir été arrachée à la banalité quotidienne). Après quarante ans les femmes ne brûlent plus des mêmes feux passionnels.

Entre vingt et trente ans, l’amour les effraie s’il devient possessif, il les ennuie s’il devient un projet facilement ficelé!

Pluie de novembre, pluie fine et scélérate, avant j’écrivais presque clandestinement à la lueur d’une modeste lampe. Je vivais également dans un état de somnolence. L’âge m’a rendu serein, je crois que les zones arides ont achevé sur moi leur pouvoir séducteur.

Les lieux, les hommes, sont-ils importants dans nos vies? J’avance comme la lame sans nom du jeu de tarot, le pèlerin marche mais il a en lui une puissante force qui lui permet d’avancer quand on croit qu’il stagne. La lame incarne une sagesse en gestation.

La vie n’échappe pas aux gens, elle est comme un jeu dont nous écrivons le mode d’emploi. Le pire consiste à croire que le mode d’emploi a déjà été écrit ou est universel! On sait l’universalité dogmatique!

Je prends rarement le train, bouger m’est devenu insupportable, par rejet peut-être d’une vitesse mensongère, étrangère à l’individu!

Le handicap chez une femme reste souvent la fidélité. Comment lui faire admettre que le bonheur se consume dans le martyr des jours?

Ici, le temps nous a éloigné de ce que nous voulions dire, de ce que nous portions en nous de riche, d’intense, d’émotionnel…

 

©George Cambon

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