PARIS Place de la Nation
Au Dalou Av. du Trône
Dialogues fictifs entre deux citadins
Interpellés ensuite par
Un poète
VILLE –
LUMIÈRE – HORIZON – DISTANCE – LUMIÈRE ET OMBRES
Interlocuteur 1 :
« Je te montre l’air du Printemps à son enseigne blanche et cristalline
Avec le drapeau multicolore, chiffonné, follement agité par le vent
Tournant en tempête, tout près de tes colonnes blêmes, voraces, bandées
Sur l’avenue … »
Interlocuteur 2
« Je te réponds dans tes lampes de couleur mercure, moutonnières qui barbouillent
De crème la pierre de taille forte pour laquelle tu n’as pas d’yeux ! »
Int. 1
« Je l’embroche de mes feux fixes et de ceux mobiles qui coulent sur la rivière
Marbrée de tes rêves . Tu n’aimes pas qu’on jette de la lumière sur tes
Monumentales et blafardes imitations de temple où la ville se vit au
Passé le plus sombre . Tes ombres sont monstrueuses : elles mordent
Comme des vampires ce qui ne se tient en toute lumière . Et qui donc
Voit ce Printemps où l’on sait se vêtir contre le froid insistant et contre
La pluie et les coups de brise brutaux qui transpercent . »
Int.2
« Oui…Mais que vois-tu si ce n’est l’éclat du paraître ? Mon horizon ?
Je le connais et n’ai nul besoin de conscience moutonnière .
Le printemps vibre le jour dans les ombres des acacias et les platanes !… »
Int.1
« Oui.. Réfugie-toi dans tes nids-casemates ! Tu ne rencontres pas
Le monde qui brille de mille feux mouvants ! »
Int.2
« Et toi , tu te moques tellement de la tempête ! Du moment que tu gardes
à l’abri : le clinquant, le pimpant et le brillant !… »
Survient un poète quelque peu impertinent…Il avait suivi à distance ce dialogue..
Le poète :
« D’où vient la lumière et qu’est-elle sans ombres ? »
Les 2 protagonistes interlocuteurs répondent, d’un seul élan :
« A quoi cela peut bien nous servir de le savoir ? D’où sortez-vous ? »
Le poète insiste :
« Alors que savez-vous de l’horizon ? »
D’un même chœur encore, ceux-ci répondent :
« C’est ce qui mène la vue jusqu’aux portes de la ville !… »
Mais, tout de suite, le tenant des feux dans la ville , affirme :
« Les yeux des grands axes sont ces étoiles à leurs bouts et…
Quand ils bougent, c’est tellement beau ! »
Le second qui se moque du clinquant dans la ville rétorque :
« L’horizon est immobile, qu’il soit gris ou lumineux, si on le
Sait le jour, on le sait la nuit »
Nouvelle question du poète :
« Et la distance, est-elle immobile ou mobile ? »
Réponse unanime des deux comparses :
« On se moque de la distance . On la franchit…C’est tout ! »
Le poète se fait insistant :
« Vous pouvez voir cela, la nuit comme le jour ? »
« Pas besoin d’effort pour franchir la distance… » répondent-ils ensemble
Le poète se fait décidément penseur et il rétorque :
« La distance recule toujours . La lumière comme l’ombre ne cachent pas
Ce phénomène… Mais que pensez-vous de l’aurore et du crépuscule ? »
Les 2 veilleurs ne s’en soucient pas et ils le font savoir .
Alors notre poète leur assène une conclusion apparemment péremptoire :
« Vous n’avez aucun horizon ! Or les deux colonnes l’ouvrent, que ce soit
De jour ou de nuit ! »
Et nos deux interlocuteurs semblent se fâcher ! Chacun pour soi contre
Le fauteur de troubles ….
Le partisan de l’ombre :
« L’horizon : c’est fictif ! »
Le partisan de la lumière :
« L’horizon est toujours barré ! »
Ce à quoi le poète répond aussitôt :
«C’est ce que je pensais ; vous êtes tous les deux enfermés dans la ville !
Vous ignorez la source de l’horizon qui est la distance mouvante à la lumière . »
Il ajoute fermement :
« Si vous sortez de votre cadre urbain, à grande vitesse ou par vos yeux,
Vous savez bien que le lointain recule d’autant plus que vous cherchez à
Attraper sa lumière… Mais l’aurore comme le crépuscule peuvent vous
Faire toucher la distance, que celle-ci brille ou ne brille pas ! Avec l’avancée ou
Le recul de la lumière, peu importe, sa source reste immobile, c’est la terre qui tourne et…
Elle tournera toujours ! La terre de la ville est sans arrêt prise par ce mouvement qui a
Comme source , non pas votre vitesse mais la distance à la lumière .
Soyez donc pour l’avènement des aurores et vous verrez combien le royaume
Des ombres, sans-cesse, dépend de la lumière ; à moins que la terre meurt !
Soyez pour l’aurore et veillez, au crépuscule… Vous aurez le printemps
En vos cœurs en toutes saisons ! »
Désappointés nos deux comparses s’en vont répétant, comme s’ils se souvenaient :
« E = MC2 , E=MC2, E=MC2 !!!! »