Le Miroir
“On ne guérit pas de son passé.”
William Faulkner, Le Bruit et la Fureur
C*** fut ma ville mère.
Présente à l’infini comme un manège tournant dans une fête aux images
Regret planté à l’intérieur de mon crâne ainsi qu’une écharde dans de la chair refermée.
Mais pourquoi, souvent, n’y a-t-il à la surface de ma mémoire que des saisons
trop nettes, brûlantes ou glacées, que des couleurs brutales et primaires ?
Cieux qui saignent, nuits marine déchirées par l’éclat d’un jaune cruel des bars illuminés
visages laqués de fards ocres et rouges, paupières mauves, yeux durcis par le crayon gras et le rimmel…
Il y eut pourtant des matins d’une fraîcheur de citron
des petites pluies et des éclaircies qui lançaient vers le ciel des flammèches d’eau pure.
Des midis pâles et lents, des soirs très doux et de longues périodes de neige
laquelle, je ne sais pourquoi, s’associe toujours dans mes souvenirs anciens
et dans mes rêves à un certain aspect bleuté de la lumière.
C’est parmi cette torpeur de l’hiver 1968, qu’une amie très chère
me donna les clés de ma destinée.
Mais, de tous ceux que j’ai connus, aimés, appréciés, rencontrés
avec joie en ce temps-là, femmes et hommes, il ne reste rien
Tous ont glissés dans l’ombre et la poussière
Je ne les vois plus que derrière un long miroir sans tain,
il passent indifférents et ne m’entendent pas
Je comprends qu’ils ne reviendront jamais
car la mort jamais ne fait crédit.
Serait-il possible de séparer les strophes (7 rimmel, 7 destinée), de mettre l’illustration sous le titre et de supprimer l’interligne de l’exergue ? D’avance, merci.