DRAME A LA PATINOIRE
Le jour du drame, mes parents et moi avions décidé de sortir nous distraire.
Mon beau-père tenait absolument à aller au cinéma -il était très cinéphile- mais ma mère et moi avions décidé de nous initier au patinage – artistique, si possible – .
Après maintes tergiversations, il capitula et nous partîmes pour la patinoire de la Fraternité, située dans le quartier « Soupetard » à Toulouse.
Nous arrivâmes sur place, nous payâmes l’entrée et l ‘on nous donna des patins que nous chaussâmes, ma mère et moi.
R. était resté sur le bord, appuyé à la balustrade pour nous regarder, ronchonnant d’avoir loupé son cinéma.
Une fois sur la glace, nous nous accrochâmes à la balustrade sans oser en décoller.
Les gens, autour de nous, avaient l’air à l’aise sur leurs patins, ils tournaient, virevoltaient, faisaient des pirouettes,
glissaient à toute allure, ou s’arrêtaient brusquement dans un petit jet de glace.
Avec ma mère, nous « mascagnions « bien !
De temps en temps, nous lâchions la balustrade et esquissions quelques pas timides vers le centre de la piste, mais vite nous revenions nous accrocher.
Nous allions à chaque tentative de plus en plus loin, nous passâmes toute l’après midi à essayer de patiner, si l’on peut dire !
Essayez de vous tenir sur des patins instables sur une surface glissante !
La fatigue commençait à se faire sentir. Quant tout à coup, dans un élan inattendu, ma mère lâcha prise et se lança , téméraire, vers le milieu de la piste !
Elle n’alla pas loin, elle tomba lourdement sur la glace et immédiatement, se mit à crier : « au secours, je me suis cassée la jambe ! »
Moi, j’arrivai le plus vite que je pu auprès d’elle et je lui dis : « mais non, je vais t’aider à te relever »
Mais je vis bien qu’une jambe était à l’équerre et qu’elle avait sûrement raison !
Vite j’appelai mon beau-père qui alla chercher le responsable de la patinoire et ils appelèrent les pompiers !
A peine un quart d’heure après, ils arrivèrent avec un brancard, ils ne mirent pas les patins, eux ,
ils marchèrent sur la glace en faisant attention de ne pas glisser avec ma mère sur le brancard !
La situation était grave et pourtant digne d’un film de Charlot, les pompiers pas trop à l’aise sur la glace,
ma mère sur le brancard avec un patin à glace qu’ils n’avaient pas voulu enlever de peur d’aggraver la cassure, quand j’y repense,
je suis morte de rire et pourtant à ce moment là , je ne riais pas !
On l’amena à l’hôpital de garde, aux urgences, et de suite le chirurgien de service se rendit à son chevet.
Elle avait toujours son patin au pied !! Quand il vit cela, il ouvrit de grands yeux et lui dit : « Madame est une grande sportive, je vois ».
Elle était à jeun depuis midi, et il l’opéra dans la nuit. Ma pauvre mère dût rester plus d’un mois dans le plâtre, bloquée à la maison !
Quand au patin, on n’a pas su ce qu’il était devenu, il devait y avoir à la Patinoire de la Fraternité, un patin qui n’avait pas le pied gauche !
R. lui, fulminait contre nous deux : « si vous m’aviez écouté, on aurait été au cinéma et tout cela ne serait pas arrivé ! »
C’est ainsi que plus jamais je ne voulus rechausser des patins et devenir la Reine des Glaces !
En cette période « rentrée des glaces », un texte fort rafraîchissant et qui me rappelle d’équivalentes mésaventures – moins grave, je te rassure – en ce même lieu qu’est la Fraternité que je ne hante plus depuis lurette… Pour ma meilleure santé !