TRAQUE D’HIER (Épisode 1)
Par un ajour de geôle, on voit, en son affublement
Sanglant, affûtiaux dignes de l’équipage
De la Mesnil, le maton qui, visiblement,
A échappé à un attentement. Son visage
Tuméfié, en cet aven reprend donc vie.
Il lance à cor et à cris un appel. L’alerte
Est ainsi donnée. La garde, mais sans envie,
S’est avoier vers la poterne encore ouverte
Pour bailler la chasse à un sombre fugitif.
Ce bast, gibier de galère et cuir de lièvre,
Aurait bataculé le gardien sans tif ;
D’autres, expéditifs, disent, une moue aux lèvres,
Qu’il l’a tué. Bigre donc, cela se paiera !
Le guet qui a dû abandonner les bagasses
Et bordières pour courir sus ce scélérat,
Ne lui pardonnera pas cette cagasse.
Qu’importent donc les cliquailles économisées :
Battre le velours est volupté en plein carême !
Ah, la truandaille, pourquoi l’emprisonner ?
La troncher ou la toster rebattrait les brèmes.
Mais faut le faire une fois pris !… Le chat fourré,
Boursemolle avéré, ne songe qu’aux épices ;
Le tourmenteur coquebert patenté, qu’aux traits
Qu’offriront les familles pour que, sous ses auspices,
Les affres de la fin du condamné soient soulagées.
On court sur le pavé. On jure. Il est introuvable
Ce bric, Cornebouc. Et la nuit, c’est à gager,
L’a avalé. La pilule est désagréable…
Le gens d’armes se retrouvent bien sottards.
Demain vilipendés par Monseigneur l’Évêque,
Moqués par les folieuses et les moutards,
Ils ne feront plus ni les farauds ni les quèques.
Il en seront fort grimauds et tout chaffourrés.
Hier héros. Ce jour zéros. Moins que maroufles.
Que dira le Seigneur du lieu, tout fourré
Ou patte à miel comme on veut, qui fait baroufle
Dès que l’on lui fait mistoufle dans son bourg ?
Il va mander qu’on continue les poursuites…
Et ainsi fut. On dut lors quitter les faubourgs
Vitement, et dès potron minet, à la suite
Du nuiteux fuyard, fort bellement armés
Pour ne point délayer l’arrêt de la justice
Divine envers qui baille à mal, et désarmer
Le féal du Malin. On passa les bâtisses
De cette menuaille vivant hors les murs,
Les chaumines des manants, de buisssonades
En champs et communaux, sur des chemins durs
Puis par des laies n’invitant pas aux promenades.
À suivre…
© ChristianSatgé – Novembre 2020