Salut à toi Glacier du Tour
Il m’en aura fallu du temps
Pour pouvoir te parler
Tout le temps d’une vie
Et trois heures de montée
Jusqu’au refuge Albert 1er
Mais le spectacle en vaut la peine
Oh capitaine, mon capitaine
Compagnon de cordée
Du général Hiver
Dans ton linceul de moraines
Tu gis-là pour l’éternité
Superbe, scintillant de blanc
Sous l’aiguille du Chardonnet
La neige de septembre
Tombée depuis trois nuits
Peaufine ta beauté
Et ce don du ciel te ravit.
Salut à toi Glacier du Tour
Ce matin tu donnes le change
Du haut de ta force tranquille
Tu m’offres des reflets bleutés
Mais je ne suis pas dupe
Je connais tes colères
Je sais tes maladies
Le malheur qui te guette
Et ta longue agonie.
Insensible aux crampons
Des nuées d’alpinistes
Et sourd aux rotations
Des hélicos bruyants
Tu ne crains pas non plus
Les accros du hors-pistes
Des Grandes Otanes
A la pointe des Grands
Tu n’as qu’un ennemi
Et c’est ta bête noire
Ce cancer du climat
Qu’on dit réchauffement.
Salut à toi Glacier du Tour
Oui, s’annonce pour toi
Une triste retraite
Grognard dépenaillé
Recouvert de poussière
Tu finiras névé…
Ah ! Te laisser mourir
Combien de fois l’idée
Traversa ton esprit
Faire dans un grand fracas
Refermer tes crevasses
Exploser tes séracs
Sur les pentes arides
Ton souffle emporte tout
Tes eaux glacées submergent
La frêle impératoire
La callune et l’ortie
Et tu pars vers la mer
Libre comme le vent
En laissant la vallée
Orpheline à jamais.
Salut à toi Glacier du Tour
Je t’en prie reste en vie
J’ai compris ton message
Et vu à travers toi
Le danger qui nous guette
D’autres bien sur viendront
Pour te faire les yeux doux
Ne les écoute pas
Car ils n’ont qu’une idée
Transformer tes rochers
En roche Tarpéienne
Et danser sur tes cendres
Au jugement dernier
Tous droits réservés
Très beau texte drôlement bien écrit, qui démontre votre amour de la montagne qui petit petit se meurt à cause de nos excès et de ce réchauffement climatique accéléré qu’on a provoqué.