La voix de l’exil – Saber Lahmidi

 

Nous, le son du silence,
La patience des cieux.
La révolte des sens,
Et le discours des yeux.

Nous, le froid du silence,
Le rhume de l’hiver.
Nous, l’abîme intense,
Et le gel de la terre.

Nous, l’âme de silence,
Attention aux cendres,
Et aux flammes qui dansent,
Crainte de se répandre.

Nous, le mal du silence,
Et les cordes du luth,
Lutte contre l’absence,
Et le chagrin des flûtes…

« Tais-toi ! ou les barreaux ».
Le bourreau a parlé.
« Quel est ton numéro
Au temps de l’exilé ? »

– « Mon numéro est long.
Persistance et défi.
Voulez-vous mon prénom ? »
– « Ton nom me terrifie »

Ne jamais s’exprimer !
« Tais-toi ! j’ai peur de toi.
Je crains tes mots armés,
Et ce qui sort de toi ».

– « Monsieur, est-ce ma faute ? »
– « Tais-toi, vu et tout lu…
Chut, Ne prends pas de notes !
Pas d’expression non plus ».

Manger et bavarder,
« Tu peux faire la sieste. »
Pour ne pas regarder,
Vers l’Ouest ou cet Est.

« Tais-toi et oublie tout,
Tes habits, tes croyances
Tes mots et tes tabous
Fuis ton stylo. Silence ! »

« Prends une cigarette,
Inspire encor inspire,
Arrête d’émeutes,
C’est l’heure de dormir »…

C’est le temps de silence,
De fumée, de ténèbres,
De chaînes, de distance,
Et de l’hymne célèbre.

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Saber Lahmidi

Saber Lahmidi (161)

Médecin et poète tunisien, Saber Lahmidi conjugue les langages du corps et de l’âme dans une écriture profondément humaniste et symbolique. Né à Tozeur, aux portes du désert, il puise son inspiration dans la lumière du Sud, les palmiers de l’oasis, et les silences du sable.

Auteur de plusieurs recueils poétiques bilingues (arabe-français), dont « La lumière m'entoure » et « Quand l’amour devient vers », il explore les thèmes de l’exil, de l’amour sacré, de la mémoire, et de la quête de soi. Sa plume navigue entre philosophie et émotion, entre le murmure d’un vers et le cri d’un monde intérieur.

Membre actif de Plume de Poète depuis 2020, il partage ses écrits comme autant d’éclats d’humanité, croyant en la poésie comme espace de guérison et de transcendance.

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Pascale Jarmuzynski
Membre
20 septembre 2021 10 h 21 min

Mes grands parents paternels ont dû quitter leur Pologne en 1936 avec leurs 5 garçons en bas âge … Accueillis dans une petite ville Jurassienne, mon grand père a vite trouvé du travail dans les mines comme beaucoup de ses compatriotes exilés … ils se sont bien adaptés à notre France … mais n’ont jamais oublié leurs racines …
Merci cher Saber pour ce bel écrit.
Bien affectueusement à vous.

Colette Guinard
Membre
20 septembre 2021 9 h 52 min

Saber .L’exilé qui devra garder le silence sur cette terrible souffrance de quitter son pays et d’être oublié! un hommage à tous ces humains dans celle-ci dure à vivre! merci du partage Bon lundi à vous ! Colette