Figurez-vous que je me suis rendu compte seulement maintenant que j’écrivais pour personne !
Ce n’est pas un complot des réseaux sociaux, mais cela y ressemble.
J’envoie mes textes à de prétendus abonnés, à des groupies sans tête, à des inconnus, même, parfois. Je ne puis que me rendre à l’évidence : chaque poème n’est qu’une bouteille à la mer. En réalité, cette mer des mirages est vide, alors la bouteille se casse, et à la première pluie, les morceaux de plastique me reviennent avec le contenu de la bouteille. Je m’en suis aperçu en découvrant une de mes strophes sur la saint Valentin dans les entrailles d’un maquereau acheté et vidé par mes soins.
Je me dis que c’est vraiment dommage que mes destinataires ne m’aient pas signifié qu’ils n’existaient plus, plus sur les réseaux sur lesquels je partageais. Tous ont dû prendre peur et déserter Whatsapp pour Télégram, Signal ou autre Colgate. Sans en ôter leur nom, mais juste leur tête. Avouez que cela me fait tout drôle d’écrire à des lecteurs sans tête qui d’ailleurs ne feront pas de vieux os car Internet n’est pas le père Lachaise.
Avant au moins, ils me répondaient que mes écrits ne les intéressaient pas et cela me faisait plaisir qu’ils me donnent signe de vie. Mais ne plus jamais répondre, je me dis que c’est mauvais signe, qu’ils ont sûrement coulé avec ma bouteille cassée.
De toute façon, ne dit-on pas que les absents ont toujours tort ? Mais le tort est il entier quand on parle de coupables sans tête ? Ou du moins dont juste la tête à été coupée sur leur compte ? Je vais finir par mettre tout cela sur le compte de la négligence. Car qui néglige son compte néglige son auteur. Pour garder ses abonnés, l’auteur pensait se montrer à la hauteur pourtant. Vous allez me dire qu’un poète voit tout de sa fenêtre, qu’il voit tout de haut et qu’après il va vous réclamer des droits d’hauteur.
Quand je fréquentais les cafés-poésie, je faisais passer le chapeau et les billets y tombaient. Maintenant, je vous fiche mon billet que si je faisais passer mon chapeau sur les réseaux sociaux je n’en ramènerais que des crottes de pigeons, et des bris de ma bouteille à la mer.
Je crois que je vais renoncer à écrire et à partager. Je préférais encore donner de ma confiture à des cochons qu’à des fantômes, surtout que rien ne me dit que je n’ai pas affaire à des cochons fantômes !
Je crois que je vais me taire sinon, ensuite, après les têtes, cela va être les noms de mes abonnés qui vont disparaitre, et alors là, je ne pourrais même plus faire semblant de les compter parmi mes lecteurs. Je présume qu’il ne me reste qu’à écrire un dernier poème, un poème funéraire en hommage aux maquereaux qui eux seuls font écho à mes envois généreusement semés pour le tout-venant, le tout-lisant qui, au final, ne lisait même plus!
Reste à conclure que l’histoire de ma poésie est en train de finir en queue de poisson.
Courage il faut continuer de jeter des bouteilles à la mer…en espérant qu’un jour elles soient messagères…
Juste un petit détail, la prochaine fois que tu jettes une bouteille à la mer, évites le plastique ça la fout mal…
En ce qui concerne les fantômes de la poésie, je ne comprends pas que tu t’en rendes compte que maintenant car ce n’est pas nouveau loin de là…
J’ai justement ouvert mon site au public il y a plus de 10 ans parce que je me suis rendu compte de suite que le domaine de la poésie était vraiment délaissé. Depuis, il y a eu quelques améliorations mais globalement c’est toujours pareil, la poésie et les discours n’intéressent pas grand monde malheureusement…
C’est aussi pour toutes ces raisons qu’il ne faut surtout pas lâcher la barre et se maintenir la tête hors de l’eau, continuer à se battre, se faire connaitre, faire connaitre ses ouvrages, ses textes, laisser des commentaires aux auteurs qui je le sais les apprécient beaucoup en retour et participer, échanger, partager…
Je parle bien sûr de quelques gouttes d’eau dans l’océan mais une goutte + une goutte + une goutte…