Je suis une larme,
J’ai pris naissance dans le Mont Chagrin,
Je traverse l’azur de ses yeux,
La plaine de son désespoir,
Baignant la cité des rêves inaccessibles,
Emportant ses souvenirs,
Amers et heureux,
Du temps où leurs cœurs battaient ensemble,
Je suis une larme
Qui perle doucement
Au bord de ses yeux,
Coule sur les plages ombragées de ses joues.
Je deviens cascade sanglotante,
Au rythme de son cœur blessé.
Je clapote doucement aux rives de son âme,
Puis elle s’endort sur ma chanson tendre.
Je divague et sillonne les prés embrumés de son silence,
J’inonde ses secrets et mon eau se glace au barrage Amour.
Puis je me jette dans le creux de son ennui,
Dans le creux de son épaule,
Dans ses angoisses qu’elle ne sait que trop bien taire.
Je suis une larme !
Qu’elle n’est pas ma douleur
De n’exister que par son chagrin.
Que dire de la douceur des larmes ?
J’aimerais plutôt être la douceur de la main
Qui savait mieux que mes rivières cristallines,
L’attendrir, la bercer et la chérir !
Je suis sans couleur,
Je poursuis mon cours sur la soie de son corsage,
Je me meurs dans son mouchoir,
Je retombe en pluie sur le tapis de sa souffrance.
Me reconnaîtra-t-elle au prochain passage ?
Me rappellera-t-elle ce soir ?
Rivière souterraine, j’attends ma délivrance.
Je suis une larme !
Je n’existe que par son chagrin, Cruel destin !
Je voudrais être là
Quand il lui reviendra tout à l’heure.
Alors avec fierté, je deviendrai rivière chantante.
Je suis une larme !