Quand tombe l’obscurité du soir s’allument par milliers des lumières. Celles sur terre, fenêtres éclairées et lampadaires puissants, semblent un reflet des étoiles.
Le voile sombre de la nuit vient pour un moment dissimuler la plus grande part de la misère et de l’ennui. Le repos sert de pause de récupération aussi bien parmi les turpitudes de l’existence que parmi les fêtes et réjouissances. Les astres qui brillent au firmament influent-ils sur notre existence ? Sans doute moins que la lune, qui me pousse à penser encore à ma brune. Que fait-elle en ce moment si loin de moi ? Elle lit dans son lit, assurément.
Minuit sonne. J’éteins tout et je vais me coucher. C’est l’heure où de vilaines sorcières à moitié dévêtues dansent en rond dans la clairière au fond des bois. Perchés sur de hautes branches d’un sapin, des hiboux assistent attentivement à leurs ébats. La nixe mystérieuse se baigne dans l’eau vaseuse d’un marais. Un vampire erre par les ruelles sombres. Braves gens, méfiance ! Fermez bien votre porte à double tour ! Le sommeil réveille trop de cauchemars et semble libérer les pires fantasmes !
Un vieux dragon chinois se promène dans mon quartier. On a prudemment coupé l’électricité dans toute la zone mais il voit clair et s’oriente par le feu qu’il crache par sa gueule ! C’est un immense serpent sur pattes avec des ailes noires et une méchante tête. Les riverains se terrent chez eux ! Moi je ne m’en fais guère car il n’a rien à faire ici et je sais qu’il partira bientôt.
Je commence à peine à m’endormir que d’étranges rêves envahissent peu à peu mon esprit et y installent une sorte de chaos qui leur est propre ! Quels sont ces fantômes vêtus de voiles blancs légers, qui pénètrent subitement dans ma chambre ? Il me semble les reconnaître à leur démarche : ne s’agit-il pas de trois amantes dans un passé déjà lointain ? Mais que font-elles ensemble, elles que j’ai toujours rencontrées séparément et à des époques différentes de ma vie ?
Je me tiens à distance des sombres sorcières du clair de lune ! Je ne pense qu’à ma bonne fée au doux regard, sobrement vêtue d’une fine chemise de gaze blanche. Elle me tient la main pour que je ne me perde pas dans ce singulier voyage. Tout se mélange et semble s’harmoniser. L’espace et le temps perdent toute mesure. Le présent, le passé, les lieux lointains et les endroits proches se confondent comme pris dans un tourbillon. Rien n’a de sens précis mais tout semble bien réel. Je m’envole dans de beaux songes !
© (Le 4/9/2018)Raymond Delattre