Sous les pavés, la lune – Jean-Marie Audrain

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Qui veut monter toujours plus haut doit résolument s’apprêter à toute rencontre.

En naviguant sur les traces du volcan, on sait que le feu et la lave auront laissé des traces tant incomparables qu’inattendues. Il faut accepter que s’estompe peu à peu la verdure, avant de serpenter via des méandres embués d’un brouillard opaque.

Premier clin de cieux quand le brouillard accorde un bref répit : une vache au milieu de ce qui ressemble au canyon du Colorado. Les effluves brumeuses reprennent leurs droits et masquent la suite du parcours sur lequel certains osent se risquer avec une simple berline affrontant les derniers kilomètres de creux et des bosses donnant une impression de rodéo intersidéral.

Après la brume vient le crachin. La hantise des téléobjectifs ! Mais la récompense est au rendez-vous : d’un côté du sentier, un paysage lunaire où s’agglutinent toutes sortes de blocs de lave grise.

Juste en face, le soleil en éveil dévoile un terroir ocre sans aucun doute tombé de Mars.

C’est l’esprit et le cœur et non les jambes qui connaissent la plus belle ascension. Bien au-delà des planètes, fussent-elles momentanément hébergées au frais, au Piton de la Fournaise. C’est la puissance de la nature, l’infinité où se confondent éternité et infinitude, que l’aventurier retient

Les pieds s’attendent à rencontrer la froidure en marchant sur la lune et le feu en piétinant mars.   Mais l’attention étant dans le lointain et l’improbable horizon, chacun a davantage l’impression de sur voler que de fouler tous ces sols venus d’ailleurs.

Le feu nous rappelle son travail acharné lorsque l’astre d’en haut darde ses rais sur les blocs de laves aux accents mi-ocres, mi-orangers. La nuit, dont il faudra se méfier tant le brouillard cerne vite les imprudents, nous est évoquée par la noirceur à perte du vue des sols de lave. Coté lunaire de ce paysage interplanétaire.

On s’y sent à la fois petit et grand. Petit par la taille et l’impuissance. Mais grand, car issus du même maître d’œuvre, du même créateur.

L’immensité des sphères qui nous attendent sur les hauteurs, ne nous proposent rien d’autre qu’un rendez-vous avec nous mêmes. Nous sommes la cendre et le feu, le temps de notre passage entre terre de lune et sol de mars.

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©Jean-Marie Audrain – 13/09/2019

 

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Jean-Marie Audrain

Jean-Marie Audrain (519)

Né d'un père photographe et musicien et d'une mère poètesse, Jean-Marie Audrain s'est mis à écrire des poèmes et des chansons dès qu'il sut aligner 3 mots sur un buvard puis trois accords sur un instrument (piano ou guitare). À 8 ans, il rentre au Conservatoire pour étoffer sa formation musicale.
Après un bac littéraire, Jean-Marie suit un double cursus de musicologie et de philosophie à la Sorbonne.
Il se met à écrire, dès cette époque, des textes qui lui valurent la réputation d’un homme doublement spirituel passant allègrement d’un genre humoristique à un genre mystique. D’ailleurs, il reçut de la SPAF (Société des Poètes et Artistes de France) un grand diplôme d’honneur en ces deux catégories.
Dans ses sources d’inspiration, on pourrait citer La Fontaine, Brassens et Devos.
Lors de la naissance du net, il se prit à aimer relever les défis avec le site Fulgures : il s’agissait de créer et publier au quotidien un texte sur un thème imposé, extrêmement limité en nombre de caractères. Par la suite il participa à quelques concours, souvent internationaux, et fut élu Grand Auteur par les plumes du site WorldWordWoo ! .
Il aime également tous les partenariats, composant des musiques sur des textes d’amis ou des paroles sur des musiques orphelines. Ses œuvres se déclinent sur une douzaine de blogs répartis par thème : poésie, philosophie, humour, spiritualité…sans oublier les Ebulitions de Jeanmarime (son nom de plume). Un autre pseudo donna le nom à son blog de poésies illustrées : http://jm-petit-prince.over-blog.com/
Pendant longtemps il a refusé de graver des CD et d’imprimer ses œuvres sur papier, étant un adepte du principe d’impermanence et méfiant envers tout ce qui est commercial.
Si vous ne retenez qu’une chose de lui, c’est que c’est une âme partageuse et disponible.

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1 Commentaire
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Invité
22 août 2020 3 h 42 min

Vraiment un très beau texte, un voyage dans l’imaginaire et aussi dans la philosophie