Hier, Alain me disait que son site ayant encore été malmené, piraté sûrement, il va devoir prendre son mal en patience. Je lui ai répondu « Ne te laisse pas aller Alain, patience ».D’où le thème de cette minute philosophique qui nous fera aller de la patience à l’impatience. Tout d’abord patience donc.
Ma grand-mère aurait dit « la patience s’appelle aussi la réussite » Elle parlait du jeu de cartes qu’il fallait retourner une à une et une fois la dernière retournée, on savait si on avait réussi ! Une image ne vaut-elle pas mille paroles ? Jetons un cœur d’œil sur le passé.
Dans la philosophie médiévale, la patience était appelée la racine de toutes les vertus. On concluait de ce fait que tout abandon de la patience entraînait, dans sa chute, d’autres vertus comme la confiance et l’espérance. Quelques siècles plus tard, on a assimilé la patience à l’âne dont parle Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra, à savoir un animal docile qui ignore le «non ». La patience inclurait donc bien la confiance et l’espérance tel un never say never again, ne dis jamais plus jamais. Avec la patience, tout finira par arriver.
Dans l’entre deux, bon nombre de philosophes classiques, de Platon à Spinoza, ont pensé que faire acte de patience, c’est se mettre à l’écoute du monde, avec contemplation.
Pour la philosophie contemporaine, la patience serait la fidélité à l’Idée infinie (pour citer Martin Heigegger). Tout cela est, certes, poétique et métaphysique, mais ne parle pas à tout le monde.
De son côté, Le théâtre a mis en scène la patience, ou du moins le patient, sous un tout autre jour : celui du grippe-sou qui est un homme patient Pensez à l’Arpagon, l’avare de Molière. C’est d’ailleurs le prénom de Picsou, Arpagon Piscou, qui s’oblige à patienter d’avoir toujours plus. La patience de Picsou ne serait-ce pas un peu l’impatience contemporaine. Ne sommes-nous pas soumis à l’accélération sociale du siècle ? Nous n’acceptons de délai que s’il nous semble rentable. Nous sommes focalisés sur le temps des horloges.
Pourtant, surveiller la trotteuse ne la fait pas accélérer.
Au contraire.
L’impatient serait-il un grippe temps ?
Un exemple imagé de l’impatience se trouve dans une bulle d’un album des Schtroumpfs de Peyo, dans laquelle le Schtroumpf Impatient trépigne parce que la soupe à la salsepareille met trop de temps à refroidir. « C’est schtroumpfement long, j’ai faim et j’ai pas que ça à faire ! », râle-t-il. Ne tenant plus, il boit, et se brûle la langue. Une occasion inespérée pour le Schtroumpf à lunettes de lui faire la morale : « Comme dirait le Grand Schtroumpf : “tout vient à point à qui sait attendre” ». A qui se montre patient autrement dit.
Dans le mot patience on entend bien la racine « pathos ». La patience peut faire souffrir. Mais la patience, en tant que « pathos », est aussi compassion, celle de qui écoute longuement autrui lui raconter tous les malheurs de sa vie. Peut-être que le Robert retirera ce mot de son dictionnaire maintenant qu’il suffit de demander quelque chose à son enceinte connectée pour l’obtenir immédiatement, de même pour les commandes en prime qu’un livreur pose sur votre paillasson avant que vous n’ayez le temps de ranger votre carte bancaire . Peut-être que si on demande, demain, à nos petits enfants ce qu’était la patience, ils répondront « mais juste un jeu, du temps des vraies cartes, du temps de nos grand-mère”.
Bonsoir Jean-Marie ! Quand j’étais beaucoup plus jeune, ma grand-mère me disait souvent que la patience était une vertu. Je ne sais plus trop sur quel sujet elle me disait cela mais je l’ai retenu. Cela pouvait servir… De mon côté et en général, je suis patiente. Mais il arrive des fois où “ma vertu” est bousculée par un évènement imprévisible et là, tu l’auras deviné, je perds patience. Pour te donner un exemple personnel, mon premier petit-fils est placé en famille d’accueil depuis plus de quatre ans maintenant et la famille et moi ne savons pas quand nous allons le récupérer pour de bon. Tant bien que mal, notre patience supporte cela mais le temps passe et nous vieillissons toutes et tous. De plus, le Covid est toujours là et avec lui, nous ne savons pas de quoi demain sera fait.
Je commençais effectivement à perdre patience pour cette chronique sur la patience…mais je dois dire que ça vallait le coup d’attendre puisque cette lecture m’a ouvert les yeux…en conclusion je pense qu’il vaut mieux mettre sous après sou de côté au lieu de faire un crédit !
Merci Jean Marie de nous avoir rappelé ces bases élémentaires que nous avons appliqué jadis… malheureusement la vie actuelle en veut autrement et on ne peut que subir…