Nous avions quatorze ans, presque de souvenirs,
De bêtises communes, de projets d’avenir.
Tout était bien confus mais serait abordable
Car nous savions alors que tout est formidable.
Un désir de grandir venu de la naissance
Nous donnerait de fait tous nos vœux de puissance
Pour combattre l’adulte et sa vie compliquée
Qui ne souffrait d’enfant que sage et appliqué.
A cet âge où naissent les grandes amitiés
Et nos joies et nos peines se scindaient en moitié.
Tu portais mes craintes, je prenais tes tristesses
Et nos ressentiments s’effaçaient en vitesse.
A la mort de Dolly, ma chienne, ma compagne,
Tu sentis ce vide qui encor m’accompagne.
Et quand vint le décès de grand-mère Cécile
Qui nous réprimandait lors de jeux imbéciles
Mais qui donnait aussi des tas de friandises,
Je compris ta douleur sans que tu me la dises.
Nous avions la pudeur des gens qui se ressemblent
Dont un seul mot suffit pour saisir un ensemble.
Nous avions tous les deux le rejet de l’école,
Ces prisons pour enfants pleines de protocole,
Où l’on réprimandait nos moindres commentaires
Où l’on devait briller ou simplement se taire.
Nos plaisirs se trouvaient en dehors des études,
Nous étions des cancres par peur des servitudes.
Les carnets à signer demeuraient nos hantises
Car nous savions le prix des scolaires bêtises.
Quand un jour tu parlas de ton départ de France,
Je ressentis alors une sourde souffrance.
Lorsque je vis partir au loin l’automobile
Et que, sur le trottoir, je restais immobile,
Je sus que ton départ de Garges lès Gonesse
Emportait vers longtemps mon frère de jeunesse.
© – Philippe Dutailly – 07 04 1995
Les frères de jeunesse et la période vécue ensemble ne s’oublient pas ! Merci pour ce partage extrêmement émouvant !
Très émouvant et joli à la fois votre texte Philippe ! Sans être indiscrète, vous n’avez jamais cherché à le retrouver ?