L’usine à douleurs – Philippe Dutailly

Le soleil brillait au dehors du vitrage

Propageant sa douceur, en un ultime outrage,

Dans la mélancolie d’une chambre fatale,

En créant l’illusion dans ce grand hôpital.

Étendu dans un lit comme le dernier accueil

Avant le grand voyage amenant au cercueil,

Le malade se soûle au vin de ses tourments

Où un moindre sourire vaut un médicament.

Quand l’infirmière vient pour vider l’urinoir,

Dans le blanc de sa blouse il ne voit que du noir,

Comme si, spectatrice de ses derniers instants,

Elle veillait, en silence, au décompte du temps.

Voilà le médecin avec ses mains publiques

Qui visite les chambres de son regard oblique

Faisant un état muet de ses pressentiments ;

Il connaît tout du cœur mais rien des sentiments.

Puis le souffle cessa, en un moment funèbre,

Où son regard vira vers les noires ténèbres

Laissant, comme souvenir, un visage effrayé

Et, dans cet hôpital, qu’un simple nom rayé.

© Philippe Dutailly – 20 11 1985

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Philippe DUTAILLY

Philippe DUTAILLY (89)

Tombé amoureux de "L'albatros" de Charles Baudelaire, poème appris lorsque j'étais 'écolier et nourri au hasard de Victor Hugo, Georges Brassens, Léo Ferré, Lamartine et beaucoup d'autres, j'ai commencé à faire rimer les mots vers l'âge de 18 ans. D'abord très inspiré par Brassens, j'ai pris, au fil du temps, mon autonomie pour en venir à des textes plus intimes qui, pour certains, servirent d'exutoire à des émotions mal vécues.

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11 Commentaires
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Anne Cailloux
Membre
2 octobre 2022 13 h 39 min

Etant infirmière et non pas fermière, tout cela est bien juste.
Bel écrit

Arnaud Mattei
Membre
30 septembre 2022 19 h 24 min

Triste, vrai et réaliste, bravo Philippe

Martyne Dubau
Membre
28 septembre 2022 22 h 53 min

Une triste réalité décrite en ce poème, oui nous ne sommes qu’un nom sur une liste ou bien un numéro de chambre où on meurt souvent dans la solitude :

Alain Salvador
Membre
27 septembre 2022 17 h 15 min

C’est écrit d’une façon si réaliste…Bravo.Philippe

Hélène Lebougault
Membre
27 septembre 2022 13 h 27 min

Dure réalité des hôpitaux où les gens sont des numéros et ou la sécheresse du cœur des soignants règnent car il faut respecter le protocole médical, dans un minimum de temps, pour un maximum de personnes.