Les roseaux sociaux – Christian SATGÉ

Petite fable affable

 

Au clair de l’aube, ce matin-là, en bord d’eau

Les oiseaux, chamaillis chamarré, chantent.

Mais leur brouhaha est éteint par ces badauds

De roseaux et de massettes qui hantent

Ce doux lieu et qui causent et qui jasent entre eux

À en perdre haleine comme en foire de  gueux.

On sait tout du goût d’untel, des envies d’une autre,

De la nuit d’icelle, de la vie de celui-là,

Des sottes  pensées d’esprits bas et las,

De l’ennui de l’un, jugé bon apôtre,

Des avis de son pair mal dégrossi,…

L’utile côtoie le futile ainsi.

À tant parler nul, dans les faits, n‘écoute

Plus son voisin, se croit fort important

Quand il n’est qu’importun, Tonton Macoute

Se voulant gourou dans le même temps.

Alors ça bruit, ça frémit, murmure

À tout va, Et, à tout vent, ça susurre.

Ce vain chahut d’incessants chuchotis

Lasse le vieux chêne qui, coi, règne

Sur la roselière aux clapotis

Et clapets agités jouant aux teignes.

Ce silence ,enfin, étonne les causeurs :

On en dit mots, par cent, chez ces jaseurs.

Mais on n’entend rien du côté de l’arbre.

Comme si le brouhaha de ces bavards

Plus loquaces encore’ que des crevards,

On s’en étonne, le laissait de marbre.

Pour surprendre quelque syllabe envolée

Des feuilles, on fait silence sans rigoler.

Pas un son. Non. Nulle phrase à surprendre.

Rien. On en frémit. Mais, Dieux témoins,

Sait-il jacter ? Or vint un peu tendre :

« Parler pour ne rien dire vaut moins

Que se taire quand on veut se faire entendre ? »

 

© christian Satgé – avril 2021

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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4 Commentaires
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Pascale Jarmuzynski
Membre
28 avril 2021 20 h 38 min

Je m’incline devant votre imagination débordante qui nous enchante …

Philippe DUTAILLY
Membre
27 avril 2021 10 h 29 min

Chapeau bas et mouche cousue ….