Les gibbons & le gibeux – Christian SATGÉ

Petite fable affable d’après Les rieurs & le bossu d’A.-F. Le Bailly

Fables nouvelles divisées en quatre livres et faisant suite au volume publié en 1811, 1823 (IV, 6)

 

On peut, ma foi, devenir des plus instruits

Et rester, dans le fond,  un parfait abruti.

Des bacheliers en frairie, une nuit

Qu’ont éclairée barolos et chiantis,

Croisent dans la rue, sous la lune déjà grosse,

Un homme contrefait et, là, tout haut, s’en gaussent.

« Mes amis, fait le premier doctement,

Cet être renflé est, voyez, un dromadaire.

Ainsi s’appelle l’animal, forcément,

Qui n’a qu’une bosse hélas, quand Ma Bayadère,

Ma mie, elle, en a fort généreusement deux !

Cette Carabosse, fait un autre merdeux,

Est bien mâle et attend, comme une vraie cloche,

Sa belle Esmeralda, pas vrai Quasimodo ?…

On s’amuse, Rigoletto, fais pas l’gros dos !

Ne dit-on “rire comme un bossu”, Le Floche ?

Oh, n’énervez pas Polichinelle, Copains !

Ce tortu-là n’est peut-être pas un clampin :

Serait-il, déguisé, Monsieur de Lagardère :

“Allez-y donc, touchez ma bosse Monseigneur,

On dit dans tout Paris qu’elle porte bonheur !”

– Bossué des temps nouveaux, c’est le légendaire

Ésope revenu vivant du monde des morts d’antan ! »

Affirme alors le dernier, tout en rotant,

Avant que de téter dignement son Madère

Et, plus noir que gris, d’embrasser le lampadaire.

Lors, on ne sent que trop que l’homme en a assez :

« Je suis bien Ésope, en effet, Folles Têtes,

Répondit l’homme fripé sans plus se froisser.

Puisque, sans fin, je fais fort gloser les bêtes ! »

© Christian SATGÉ – Décembre 2021

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Arnaud Mattei
Membre
16 décembre 2021 20 h 54 min

Enorme comme toujours et si plein de vérité, comme d’habitude