Petite fable affable
Un oiseau ravisseur s’était pris d’amitié
Pour un quetzal resplendissant, un animal
Qui a plus de queue que de plumes et, pitié,
Moins de chair que de plumage. Où est donc le mal
Me direz-vous ? C’est que le premier est rapace,
Prédateur du second, aux tropicaux espaces.
Certes, tout est à l’excès en ces forêts-là
Mais quand même, avouez, Amis : faire du plat
À son pire ennemi est chose dangereuse
À tout le moins. Cervelle d’oiseau ne vaut pas
Plumage ou ramage et une vie courageuse
N’explique pas que l’on coure ainsi au trépas.
Pire, le grand fauve ailé, vivant guindé
Quoique volant de guingois, était moins ami
De l’autre emplumé que ce-dernier ne l’était
Du prédateur. Ce sont las des infamies
Courantes en ces vils pays restés en jachère…
Et autres lieux circonvoisins, Ma chère.
Mais le quetzal, heureux, n’en soupçonnait rien.
Il présenta ce proche prochain aux siens
Qui lui firent bon accueil comme on sait faire
Chez ces bêtes courtoises et affables. Hélas,
Trois fois hélas, ce gerfaut leur fit leur affaire
Ayant, enfin, là, l’équivalent d’un tétras !
Ne vous attachez point aux gens qui vous dédaignent
Si vous craignez qu’un jour votre bon cœur ne saigne.
© Christian SATGÉ – octobre 2021