Le poulet grillé – Christian satgé

Petite fable affable

Chacun le sait : « Mieux vaut poule d’aujourd’hui
Qu’œufs de demain ! » C’est d’avoir oublié, un soir,
Cette maxime qu’un poulet en fut réduit
À voir le ciel tomber sur sa crête, houssoir
Déplumé depuis, quoiqu’il ait gardé l’ego
Plus tranchant et plus piquant que ses deux ergots.

Ce bon gallinacé s’ennuyant dans sa cour
Et se croyant belle et bonne plume, ma foi,
Avait contacté en masse, pour faire court,
Tout ce que l’édition comptait autrefois
De rapaces et de buses. Et tous, malins,
Lui promirent d’être coq, le verbe câlin,
Du jour au lendemain, qu’il règnerait bientôt
Sur un gras et bon tas de fumier fumant,
Contre une des plus maigres parts de ce gâteau
Que seraient ses droits de hauteur du moment.
Et ce temps glorieux lui viendrait au plus tôt…
On n’attendait que le talent de ses romans !

Les plus filous lui firent débourser son bien
Car seuls les vrais fous, hélas, ignorent qu’il faut
Donner un peu pour gagner beaucoup et ô combien.
Ce fil à la patte était coutumière faux
De ces renards emplumés ayant si bon bec
Que le plus prudent croit en leurs bons salamalecs.
Et c’est ainsi que juchés sur un petit tas
De bouquins achetés à prix d’or par ses soins,
Ignorés même du plus érudit des rats
De bibliothèque, se morfond, dans le besoin
Jeté par ses rêves, notre poulet peu gras,
Risée de sa cour, de sa défaite témoin.

Combien, comme lui, sacrifient, un jour,
À leur simple mais avérée tranquillité
Une possible et fumeuse prospérité
Dont ils se mordront, hélas, les doigts pour toujours ?

© Christian Satgé – octobre 2018

Nombre de Vues:

25 vues
Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

S'abonner
Me notifier pour :
guest

6 Commentaires
Commentaires en ligne
Voir tous les commentaires
Invité
9 octobre 2018 11 h 27 min

Bonjour Christian très belle fable j’adore vous lire
Excellente journée
Mes amitiés
Fattoum.

Laurent Vasicek
Membre
9 octobre 2018 5 h 53 min

Excellent … merci …

Anne Cailloux
Membre
8 octobre 2018 21 h 43 min

Voila, il fut le dindon de la farce..
Ces fables sont tellement plus attirante avec nos amis
qu’avec nos congénères.
et pourtant nous avons rien à leur envier
Bravo à vous Christian..
Anne