Petite fable affable
Sur Le chêne et le roseau, Jean de La Fontaine, Fables, Livre I-22
Noble, Thémis dit au capon :
« Donc vous n’avez point de remords, pas d’état d’âme ?
Pour avoir fourni à l’Allemand des wagons
Plein de juifs – vieux, enfants, femmes –
Durant toute l’Occupation ?
Pour avoir fait noyer par balles
Des Algériens processionnant
Contre cette guerre qu’on a faite à Oran,
À Constantine la Rouge, Alger la Fatale ?
Car vous avez beaucoup duré.
Tout vous fut bon pour déporter vos prochains,
Les détruire ou bien les faire aller à Cochin
Après les avoir torturés
Ou frappés à coups de machin !
Vous, pétainiste fait gaulliste…
Que rajouter à cette liste ?!
N’auriez-vous que vos traits qui paraissent humains ?!
– Silence, foutre-Dieu, répondit le malin,
Il suffit ! Parlez de ce que vous connaissez !
J’en ai assez d’être pour Clio une cible
Et d’entendre ainsi chacun bavasser,
Tous ces sans-cœur soudain devenus si sensibles
Car, en toute situation,
J’ai toujours servi ma Nation,
Mon Pays… où la fin justifie les moyens !
Moi, j’ai fait respecter, partout et toujours, l’Ordre ;
Et pour l’État servi aux ordres.
Je suis donc un bon et honnête citoyen !
– Nullement inscrit au casier ! –
Vous me voulez tous coupable
Mais, fonctionnaire, je ne suis pas responsable !
Et Vous donc, durant ces années-là, vous faisiez… ? »
© Christian Satgé – mai 2011
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