Le bachelier face au virus – Christian Satgé

Petite fable affable
Un escholier, studieux comme seul sait l’être
Un nauséeux réfractaire aux chiffres et aux lettres,
Piaffe à l’annonce qu’un mal
Venu de… là-bas, l’animal,
Pourrait, las, l’éloigner de ses chères études
Le confinant chez lui en toute latitude.
Cela doit durer plus d’un mois.
« Mais c’est fort peu, excusez-moi ! »
Au premiers jours de l’enfermement, l’élève
Jouit tout son soul des plaisirs et de leur sève.
La semaine touchant à sa fin,
Il trouve que c’est long, mais la faim
Du savoir scolaire ne l’ayant pas pris, même
Au dépourvu, il voudrait tirer sa bohème
Jusqu’après la fin de l’été.
Au moins. Pour commencer. Ben té !
Au dimanche suivant, l’ennui point à peine.
Mais les minutes s’allongent un peu, arachnéennes.
Les profs ne manquent certes pas,
Mais les amis si ; les sympas
Comme les autres. Alors il joue, dort et sommeille
Entre deux siestes et tâte de la bouteille.
La semaine peine à finir,
Mais ce virus est à bénir !
Semaine trois. Notre brave cancre ne s’amuse
Plus guère. Délaissés, ses jeux jonchent cambuse
Et couloirs. Son amie lui fault
Et Onan a plus d’un défaut…
La quatrième huitaine déjà l’insupporte
La réclusion ne lui est plus si accorte :
Avoir les parents sur le dos,
Tout le jour, c’est pas un cadeau !

Ce bêta bâté retrouve enfin et, à date
Dite, ses bancs détestés quittant la ouate
De son cocon, lors abhorré
Et qu’il avait tant adoré.
C’est ainsi, quand on obtient ce que l’on souhaite,
Le temps érode ses charmes et, en girouette,
Ce que l’on voulait et aimait
Fini détesté… à jamais.

© Christian Satgé – avril 2020

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Invité
22 avril 2020 11 h 31 min

Un très beau poème, merci pour ce texte d’autant plus que je m’y retrouve…

Invité
21 avril 2020 12 h 19 min

« Dans la nuit où nous sommes tous, le savant se cogne au mur tandis que l’ignorant reste tranquillement au milieu de la chambre. » Anatole FRANCE

Au dépourvu, il voudrait tirer sa bohème…tss-tss-tss quel cliché ! …on tire ” sur ” la Bohême

Alors il joue, dort et sommeille
Entre deux siestes et tâte de la bouteille…je me sent moins seul dans cette routine…qui tend à nous rendre con…in fine..

Invité
20 avril 2020 21 h 48 min

Beaucoup de plaisir à lire ce texte. Portez vous bien

Brahim Boumedien
Membre
20 avril 2020 19 h 36 min

Merci, Christian, pour ce partage intéressant et utile !