La rose et l’azuré – Christian Satgé

Petite fable affable d’après La Rose &  le papillon d’A. Houdar de La Motte (Fables nouvelles,  II, 7)
Dame Nature se riait du Printemps
En offrant douceur sereine à tout instant.
Flore y dispensait ses faveurs odorantes,
Pomone et Cybèle promettaient cent rentes
Dans ce grand jardin où roseraie, éclose,
Donne à la fable qui suit ses faits et causes.
C’est là qu’un frais bouton de rose éclata ,
Prêt à s’ouvrir à tous desiderata
Des nues d’azur,  pétales serrées encore.
Au papillon aux ailes de ciel bordées
D’hermine que rien, jamais, n’édulcore, 
Brillantes comme des soleils en cordée,
Elle s’offrit. Sous l’adresse de ses caresses,
L’ingénue, rosissant prou, s’épanouit ;
Ce premier venu procura l’allégresse
À Rosie et l’extase de celle qui jouit.
La rose en rougit car on est plus pudique
Que lubrique en son si bel et bon pays.
Puis le galant va courtiser, épisodiques
Passades, d’autres fleurs et ainsi trahit
L’aimée du matin. Changeant comme un caprice
Et léger ô combien, l’infidèle passa
Sa journée à batifoler sans avarice.
Au soir, il retourne à sa belle qui lui dit ça : 
« Je t’ai vu butiner qui çi de nobles têtes,
Qui là de rustiques corolles, l’Ami.
– C’est que j’ai le goût sûr, étant un esthète.
Et je vous reviens. Flatteur, non, Ma Mie ?!
– Est-ce tout l’Amour que vous éprouvez, traître
Goujat ?!
 – Il vous sied d’user de ce maître-
Mot, Ma Rosie, car Mignonne dîtes-moi
De quelle abeille refusâtes-vous l’hommage ?
Ma frivole, quelle mouche, tout émoi,
Ne vous a-t-elle piquée ?… Est-ce dommage
Qu’une séductrice soit si gracieuse ?
Que non pas !… Allez, donnez-vous sans compter
Et point je ne viendrai vous en conter
Car c’est dans l’ordre des choses qu’un volage
S’éprenne d’une coquette et l’épouse en partage ! »
© Christian Satgé – novembre 2020

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Patrice Fougeray
Membre
9 novembre 2020 18 h 08 min

Je ne connais pas la fable de Houdard de la Motte, mais la tienne est bien mignonne.