CHAPITRE 2 – Une patte après l’autre…
– Alors Câline, tu en dis quoi de la campagne ?
– Ben, d’abord c’est froid et humide. Puis ça devient doux et lumineux… habité mais pas aussi bruyant que la ville. Enfin, ce que j’ai pu en voir du rebord de la fenêtre. Du bruit et de l’agitation. Ici, tout semble, comment dire… « chatoyant » et « mielleux » … mais c’est le parcours du combattant.
– Ah, bien sûr, toi, tu as quatre pattes qui prennent la rosée et tu dois passer sous les haies pour sortir du jardin… mais pour moi c’est plus facile.
– Et le vent, tu oublies le vent. Moi ça m’a effrayée au début. Comment fais-tu, toi qui es si léger et fragile ?
– Oh, ne t’y fie pas ! mes ailes sont beaucoup plus costauds qu’il y parait. Par contre, je te demande instamment de ne plus y toucher, cela m’a fait pâlir la dernière fois. Et sans couleur je deviens sans famille, tu comprends ? Même ma famille ne me reconnaitrait plus
– Mouhai ! Je ferai attention, de toute façon moi non plus je n’aime pas trop que les gens me tripotent, sauf Madouce bien sûr.
Câline prend un temps pour rêver tandis que le papillon papillonne. Puis elle reprend :
– Miaouh ! écoute, pour l’instant je préfèrerais que l’on retourne dans le jardin, pour le reste on verra plus tard. Ici il y a trop d’espace pour moi, ça manque de murs. J’ai le vertige…
– Ok, on y retourne. Baisse la tête pour passer dessous, et moi je prends mon envol.
De l’autre côté :
– Mahou ! dis-moi, j’ai entendu un sacré vacarme à l’intérieure de la haie. Qu’est-ce-qui se passe là-dedans… on dirait la musique de Chéri quand il la met « à fond ».
– Ah ça ma minette, c’est la famille Pinson. Ils sont réglés comme du papier à musique. Tous les matins ils font les vocalises, puis ils se calment un peu. Ils chantent toute la journée la même chanson, une centaine de fois par heure. Et puis le soir, Madame Pinson rappelle les enfants et tout le monde refait des vocalises avant de se coucher.
– Maouh ! il va falloir que je leur apprenne le moderato à ces gens-là.
– Oui, bon en attendant regarde, tu es au milieu de mon garde-manger.
– Maouh ! Mais c’est une œuvre d’art… Ma pâté à moi, c’est de la bouillie marron… mais c’est délicieux.
– Oui mais moi, je suis un délicat ma chère. Avant, quand je m’appelai encore Chenille, je mangeai volontiers les feuilles des arbres. Mais aujourd’hui, j’exige le meilleur, le nectar des fleurs. Elles m’offrent volontiers leurs pistils mais je dois partager avec quelques mouches rayées et bruyantes. Les fleurs me disent qu’elles sont prioritaires car ce sont des laborieuses, elles… Je ne sais pas ce que cela veut dire, mais bon, je n’ai pas le choix.
– Et comment tu sais celles qui sont bonnes pour toi, ces fleurs ?
– Et bien je les goutte avec mes pattes, délicatement pour ne pas les abîmer. Il faut respecter la nourriture : c’est un principe dans le monde animal…
– Oui, et bien je connais des humains que devraient bien en prendre de la graine ! Bon mon papillon, je ne m’ennuie pas, mais tout cela me donne faim. Je te laisse à ton dîner et je rentre réclamer le mien. A demain !