Théurgie – Philippe Cailleux

Elle se déploya, s’engendrant Elle-même.

Jour 1.
Dans leur état premier, principes indistincts, visible et invisible et le temps et l’espace prirent chacun sa place en l’ouvrage émergeant.
De l’Abîme surgit, phagocytant le vide, pendant qu’infiniment naissait l’éternité, un monstrueux vortex de mana galactique.

Jour 2.
Entre lumière et nuit de l’absence jaillit un flux qui satura l’immensité nouvelle. Naquirent des soleils, alors, par milliards.
Là, dans le cours igné de cette multitude, Elle réalisa le ballet sidéral en inventant des lois selon sa fantaisie.

Jour 3.
Du limon détaché de l’ordre incandescent Elle meubla l’éther d’un brouillard planétaire.
Dans un coin reculé tout au fond du cosmos, Elle choisit une facule imperceptible et parmi les orbes qui gravitaient autour, en partant de son centre, Elle prit le troisième.

Jour 4.
Du Logos irriguant le globule, Elle fit que soient et l’air et l’eau et le feu et la terre.
Voici que de l’humus sortirent les reliefs, des océans, des monts, des fleuves, de la plaine.
Il fut de la prairie, il y eut des forêts, ce grouillement, enfin, qui s’appelle la vie.

Jour 5.
Ça se mit à frémir, à ramper, à voler…
Parmi les animaux, Elle élut un primate qu’Elle dota d’un embryon d’entendement, juste assez pour mener le projet à son terme.
L’homuncule joua pour la divinité.

Jour 6.
Elle entendit, Elle écouta sa créature et l’aima constatant que cela était bon.
À la pemptê ousia qui avait nourri l’acte premier de la physis, à cet être, à la fin, Elle donna son nom, ce nom est Théurgie.

Jour 7.
Puis le septième jour, inconcevablement, Elle se replia, puisque achevé son rêve.

Tout n’avait jamais existé.

 

(2013).

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