L’allure martiale, le pas lent, cadencé,
Ils marchent, endimanchés de noir,
Sur le pavé humide de la rue Beaumarchais.
La larme de circonstance au creux de la paupière,
La mine désespérée des grands jours de silence,
Ils suivent le cortège protocolaire
Vers la dernière demeure de leur ami défunt.
Le ciel gris étale son grand voile pluvieux.
Lui aussi avait rendez-vous en ce jour funèbre.
Une bruine fine et luisante arrose le corbillard
Fleuri de toute part aux couleurs mortuaires.
Madame est là !
La face cachée d’un foulard de soie noire
Comme pour mieux s’isoler des personnes qui l’entourent.
Elle signe, de la tête, leurs présences polies
Mais ne les distingue pas dans son chagrin profond
Car eux ne le connaissaient que par “ bonjour, bonsoir ”
Car eux ne savaient pas !!!
Alors, madame se saoule de son précieux passé.
Leurs années de jeunesse et leur premier bébé
Et lui si beau, si parfait dans l’amour,
Faisant, de son sourire, le soleil du jour.
Ses baisers enjôleurs qui la faisaient frémir
De frissons exaltés qu’on ne peut définir.
Madame pleure…….
Sa vie se désagrège à l’infini.
L’homme qu’elle chérissait part en terre aujourd’hui.
Des cris de joie s’élèvent d’une maison voisine.
Un couple s’y unit et embrasse le sort.
Le jeune homme est beau et la fille radieuse,
Dans sa robe immaculée, couleur de pureté.
Ils se caressent du regard et attendent le soir
Où s’ouvriront, pour eux, les portes enchantées
De l’amour partagé………..
Les invités plaisantent et rient avec éclat
Et chacun d’eux commente en des propos flatteurs :
“ Mon dieu, comme ils sont beaux !
Mon dieu, quelle élégance !”
Et le couple s’enlace tout près de la fenêtre
Comme pour montrer aux gens
La flamme de leur amour naissant.
Mais la rue est grise, pâle, silencieuse
Et les spectateurs de leur fougue amoureuse
Marchent, endimanchés de noir,
Sur le pavé humide de la rue Beaumarchais.
© Philippe Dutailly – 02 01 1976
ainsi est le cycle de la vie
pour certains elle commence dans le bonheur
pour d’autres elle finit sous une pluie de larmes …
Merci pour ce partage sur la vie et le temps qui fuit !
un bien joli écrit Philippe