Deux enfants dans la ville
J’avance sans buts dans ma cité en ruine.
Une main géante a broyé mes lieux enchantés.
Je n’ai pas reconnu la petite école aux volets bleus.
Ni le jardin d’enfants aux mille couleurs.
Je ne sais où aller…
Dans mes bras, mon frère s’est endormi.
Autour de nous, les murs déchiquetés
Semblent lever des poings rageurs
Pour défier la fureur venue du ciel.
La chanson dit que la réponse est dans le vent,
Mais dans la vraie vie : où est-elle ?
D’ailleurs, je ne me pose plus de questions.
J’assure mon pas, comme le funambule,
Lui, au-dessus du vide, sur une corde raide,
Moi, au-dessus du néant, sur le fil fragile de ma vie.
Ici, les vilains petits canards ne deviennent pas des cygnes.
Alice n’a pas trouvé le pays des merveilles.
Et la petite fille d’Andersen a craqué sa dernière allumette.
Plus tôt, mon frère m’a demandé :
— Est-ce qu’il y a des bombes au paradis ?
— Non.
— Alors, on pourra jouer sans se cacher ?
— Oui.
— Et on n’aura plus mal ?
— Non.
— Et on ne grandira plus ?
— Non plus jamais.
Quand il a fermé ses yeux pour toujours :
Il souriait encore…
La petite Olena
Gérard Taverne novembre 2024