Chez la Vevette, au café des amis
Chez la Vevette, chez nous, au café des amis,
Un comptoir de bois qu’elle tenait avec son chéri.
Quelques tables, des chaises, une douce chaleur,
D’une villageoise institution aux instants bonheurs.
Le vendredi à la veille du repos dominical,
Rituels sacralisés autour de ces nectars divins,
Ensemble partagés en cette chapelle absidales
Des discussions interminables. Dans son coin,
Il y avait esseulé, le petit taiseux qui voyait tout,
Et à l’opposé, le paon prétentieux n’écoutant rien
D’autre que lui-même. Seul parlant, oubliant le nous,
Saoulé par les futiles divagations de ce triste pèlerin.
Plus loin, le Paul, L’Henri, le Victor et le Roger,
Réunis pour une partie de cartes endiablée,
Canons de rouge posés bien à portée de main,
Du supérieur pour sûr, une belotte le vaut bien.
Quand l’ingénieur se voulait le plus intelligent,
Imbu et méprisant et de ses diplômes se vantant,
Tu lui répondais si malicieuse et un brin énervée
J’ai aussi deux bacs, l’un pour laver, l’autre pour rincer.
Elle devait bien de temps en temps nous maudire,
Quand tard dans la nuit, au bar, nous voulions rester.
Mais le fit-elle, c’était toujours avec le sourire.
Le rideau va tomber, c’est déjà la dernière tournée.
Quand la Vevette brutalement s’en est allée,
Dans nos doux souvenirs, mille images tenaces,
De ces bonheurs simples à un bistrot accoudé,
Se sont envolées dans la bruine du temps vorace.
Ta fille et ton Denis de mari, l’affaire ont poursuivi,
Glorifiant Saint Vincent tout en servant ses adeptes
Enivrés au son singulier de leurs doctes préceptes,
Qui abreuvent le soir de ces prophéties qui ont fui,
Dans l’ambiance enfumée des cerveaux embrumés,
Où tout y passait, la marie, les patrons, les ouvriers.
Et pour éviter les disputes, comme disait le Charly,
Encore un pour la route, une petite soupe et au lit.
Certains parmi vous, un matin le café, ont quitté,
Si jeunes, trop tôt, trop vite par la mort, fauchés,
Le Bernard, le Jean-Marc et le Charly envolés,
De là-haut, allez, trinquez tous trois à notre santé.
Un café disparu est village qui lentement s’éteint.
Et les barrières un moment tombées se dressent,
A nouveau dans l’indifférence de tous et de chacun,
Isolant l’autre dans un abime sans fond de tristesse.
Arnaud Mattei, le 14 Janvier 2021
. C’est vraiment l’ambiance qui se dégageait quand Charly m’amenait chez la Vevette lors de nos passages en Lorraine. Félicitations Arnaud
Un normand
Une atmosphère des années cinquante, des personnages touchants…. Une réussite totale.
Merci Arnaud pour ces moments nostalgiques et heureux que nous avons tous plus ou moins vécu. Votre écriture simple avec de très bons clichés, reflète parfaitement l’ambiance, les rituels et les sentiments. On se laisse porter dans cette lecture feutrée tant regrettée.