Petit tas couché, Petit tas blessé – Véronique Monsigny
Petit tas couché, Petit tas blessé
Petit tas tombé, Petit tas laissé
Je me couche ce soir, je tombe de fatigue
La journée m’a lassée et parfois m’a blessée
Mais jamais en vesprée me trouve délaissée
En refermant ma porte bien au chaud je m’endigue
Toi qui dors dans la rue par ce froid où l’on craint
De sortir le chien de peur qu’il ne s’enrhume
On t’oublie car nos yeux se font voile de brume
Pour nos cœurs qui ignorent ce que c’est qu’avoir faim
Toi qui dors dans le froid tandis que pour nos aises
Pour combler nos envies qui ne savent plus attendre
Nous chauffons les légumes et les fleurs les plus tendres
Afin d’emplir nos bouches en hiver de fraises
Tu tombas dans la rue, quand je tombais enceinte
Je tombai amoureuse, toi tu tombas tout court
Et toujours est en cause Celui qu’on nomme Amour
Qui cajole certains et qui d’autres esquinte
Toi tu gis là blessé par la vie nous dit-on
Mais non, c’est trop facile, c’est mon regard qui blesse
C’est ma peur de l’autre qui ce soir te délaisse
D’Abel je suis Caïn ton œil est dans la tombe
Mais non c’est trop facile c’est mon indifférence
Mon absence d’amour qui peu à peu te tue
Alors qu’il suffirait que je te dise « tu »
Me souvenir enfin de mon frère en errance
Petit tas couché, Petit tas blessé
Petit tas tombé, Petit tas laissé
Triste constat : notre société a échoué, nous avons échoué et le pire est que nous allons d’échec en échec. Le salut viendra sans doute (car il reste de l’espoir) d’un nombre important d’anges, à l’image de Véro, pour rendre à l’humanité, son humanité…
Merci, chère amie, pour ce partage qui nous amène à voir la réalité nue, et en face.