L’envol du cerf-volant – Christian Satgé

Petite fable affable
Librement inspirée par Le cerf-volant & la comète
de Bartélémy Imbert (Fables nouvelles, 1773)
 
Un cerf-volant accouplé à une lanterne
En bout de corde, balançant,
Se voulait meilleur que la lune, astre terne
À son goût, fort peu innocent.
« Elle est si lointaine, si grosse et si hautaine
Alors qu’elle n’éclaire pas plus
Qu’un lumignon des moins brillants !… La fontaine
Où elle vit comme un reclus
Me l’a dit dans un bref salut ! »
 
Pas-dessus sa tête, hélas, passe une comète
Et lumineuse, et chevelue,
Qui traverse le soir plus vive qu’allumette.
Il crut avoir eu la berlue
Mais une autre étoile file et court à sa suite.
« Ces feux m’indiquent un chemin !…
Leur apparition ne peut être fortuite :
Ils guident en un tourne-main
Leur élus vers de beaux demains ! »
 
Croyant ainsi que le destin lui fait un signe,
Le captif s’agite et secoue,
Jà, sa lumière en tremble et crisse cet indigne
Fil qui le lie au sol, licou
Sans cœur qui le bride. Il en rougit de rage.
Son lampion aussi. Glissant,
De dextre à senestre, il use avec courage
Ce lien si avilissant,
L’élime et le rompt, l’agaçant.
 
Libre, il monte aux Cieux avec toute la grâce
Que lui donne le vent léger.
Mais une soudaine bourrasque le terrasse
Et vient à le piéger
Dans une mare où se noie vite sa lanterne,
Où se déchirent toile et corps,
Sous l’œil de Séléné qui, déjà se prosterne :
« Je suis, cher ami si accort,
Certes pâle… mais là, encor ! »
 
© Christian Satgé – avril 2016

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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