Dans son livre de dialogues intitulé « Gorgias » (nom du protagoniste principal) Platon (428-348 avant J.-C.) expose le paradoxe socratique : «Nul n’est méchant volontairement». Une thèse contre-intuitive de prime abord, qui s’éclaire si l’on comprend que, d’après le philosophe, les hommes commettant l’injustice le font par ignorance du véritable bien. Ils confondent le bien
illusoire – le plaisir, la satisfaction immédiate de désirs déréglés – avec le bien réel : la santé de l’âme. Plus loin Socrate dit que si l’on percevait, toute la réalité du mal fait, à soi et à autrui, on n’aurait plus le désir de le commettre. Il y a du karma dans cette morale socratique.
Dans une analyse pas si éloignée, Saint Thomas d’Aquin définit le mal comme un non-être, comme la privation d’un bien (Somme Théologique, I, q 48, art 3, ad 2um).
On comprend ainsi que le décalogue n’est pas un catalogue d’interdits divin mais une « pédagogie » (une des traductions du mot hébreux traduit aussi par « commandement ») visant à ne priver ni Dieu ni autrui ni soi-même d’aucun bien. – Je dis-soi-même dans la mesure où tout mal commis nuit à la « santé » de mon âme –
Malgré tout, Saint Paul ne dit-il pas : « Car je ne sais pas ce que je fais ; le bien que je veux, je ne le fais pas, mais le mal que je hais, je le fais ». Rom 7,15. ?
Il apparait donc comme évident que l’on ne fait pas que le mal que nous voulons commettre. Des enfants se dédouanent facilement du mal qu’ils ont fait puisque – selon leurs dires – ils ne l’ont pas fait exprès.
Si nous nous référons à Saint Thomas d’Aquin, ce n’est pas en soi que l’on trouverait le sentiment, la conviction, la croyance de faire le mal, mais dans celui ou celle qui nous en revoie l’écho. Il n’y a de mal que le mal fait à quelqu’un. Le mal n’est pas une idée – comme expliqué dans le livre Dieu sans idée de mal du Dr Philippe Madre aux éditions de la pneumathèque, mais une souffrance infligée, la privation d’un bien, que nous en rendions compte ou non !
Le mal se situe donc en deçà de la volonté et de la conscience, dans le penser, le dire, le faire ou l’omettre ! Attaquons-nous donc au mal à sa racine : au plus profond de nous-mêmes ! Jusqu’au fin fond de nos zones d’ombres (inconscient freudien ou autre appellation).
Un antidote au mal,en sus de l’humitilité, serait de mettre au service du bien, résolution après résolution, précisément ses pensées, ses paroles et ses actes, en un mot sa destinée.
Cela n’empêchera certes pas le juste de pécher 7 fois (pas jour?), comme le rappelle le livre des proverbes 24, 16. : «Car sept fois le juste tombe, et il se relève».