CELUI QUI CROIT EST ÉTERNEL – Véronique Monsigny

  • CELUI QUI CROIT EST ÉTERNEL – Véronique Monsigny

 

Les animaux étaient dans l’arche  et commençaient à s’ennuyer. Ils se plaignaient et demandaient sans cesse à Noé s’ils retrouveraient bientôt la terre ferme. Le patriarche les rassurait et leur disait d’avoir confiance sans pour autant leur donner de délai.

Il faut dire qu’en ce temps là, le temps n’existait pas. Noé avait déjà vécu plus de neuf cents ans et ne le savait pas car il ne les avait jamais comptés. Les animaux peuplaient la terre depuis la création du monde et comptaient bien y rester pour l’éternité.

Noé, sa femme et les animaux s’ennuyaient tellement qu’ils se dirent :

– « Si nous sommes condamnés à rester sur ce bateau toute l’éternité, nous allons mourir d’ennui ! ».

 Et ils commencèrent à compter les jours. Ils en comptèrent quarante et décidèrent d’envoyer le couple de colombes en éclaireurs pour voir si la terre s’asséchait. A trois reprises, ils les avaient comptées, les oiseaux revinrent épuisés. Ils n’avaient pu se poser nulle part, tout était inondé. Alors le désespoir gagna  toutes les espèces d’animaux et même Noé et sa femme commencèrent à douter.

Un jour, les colombes ne reviennent pas du tout. Le désespoir s’installa et les espèces qui jusque là vivaient en bonne entente, commencèrent à se disputer, à s’accuser mutuellement d’avoir causé  la perte de l’humanité. Mais au bout d’un certain temps qui leur sembla une éternité,  les colombes revinrent avec un rameau d’olivier dans le bec. Elles expliquèrent que la terre était réapparue et qu’elles avaient pu se poser et se reposer sur un olivier. Pour en témoigner elles en   avaient ramené une branche à leurs compagnons.

Ce soir là, chacun oublia le temps et retrouva la fraternité.

Quand l’eau se retira enfin et que tout le monde put sortir de l’arche, l’Ange de Dieu vint accueillir les créatures sur la terre ferme et leur dit :

– « Nous sommes à l’aube d’une nouvelle création. Dieu voulait refaire toute chose nouvelle mais Il a du modifier ses plans ».

Noé et les animaux, très inquiets, demandent ce qu’il va se passer. Dieu a dit : 

– « Jusqu’à présent n’existait que éternité et la Parole créatrice. Par vos doutes vous avez inventé l’impatience et le temps en le comptant. Parce que vous n’avez pas cru en la Parole, l’avenir sera dissocié du présent et vous sera inconnu. L’homme perdra l’instinct et la vision de sa vie. Quant aux animaux,  ils perdront la parole.  Les hommes parleront sans savoir tandis que les animaux sauront et ne pourront le dire.  Aux plantes et aux animaux j’assurerai le vivre et la  vêture et ils conserveront la confiance de l’enfant privé de mots, tandis que les hommes, par le langage, acquerront la connaissance au prix de leur innocence et de la paix».

Et c’est ainsi que le monde connu le prix de l’éternité. Ce que l’homme possède déjà au fond de lui, il l’ignore et le cherche sa vie durant. Dans sa course il connait la peur et la solitude. Surtout, il craint et fuit  la mort qui l’attend au bout de son voyage, mort qui n’est pourtant que  retour à l’éternel séjour.

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Véronique Monsigny

Véronique Monsigny (204)

J'ai commencé à écrire des poèmes à l'âge de 60 ans. Ce n'est pas moi qui les ai cherchés, ils se sont imposés à moi comme une bouffée d'air pur au moment de la retraite. Enfin laisser parler les mots qui dorment en moi !
J'ai lu Victor Hugo et Lamartine à l'adolescence, puis Aragon et Baudelaire un peu plus tard. Brassens a bercé mon enfance. Ils m'ont appris à rimer en alexandrins.
Le virus était en moi. Il y a sommeillé le temps de travailler, d'élever mes enfants, de taire mes maux pour mieux m'occuper de ceux des autres.
Et voilà le flot de mes rimes sur lesquels je navigue aujourd'hui, au gré des jours bons ou moins bons. Ils me bercent, ils m'apaisent... je vous en offre l'écume du jour.

3 réflexions au sujet de “CELUI QUI CROIT EST ÉTERNEL – Véronique Monsigny”

  1. Merci, Véro, pour cet écrit qui nous amène à regarder la vérité : en face, telle que le Créateur l’a voulue. En polluant la nature humaine et la nature tout court, l’homme a tout dévoyé. Un ami, échaudé par l’expérience qu’il a vécue, me disait l’autre jour : “je ne crois qu’à ce que je tiens”. Alors ?…

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