Casablanca, ma belle,
Ma belle ville blanche,
D’un coup à tire-d’ailes
Mes souvenirs se penchent …
Mais qui aurait pu croire
Qu’à mon âge, arrivée,
Je ressente intense
Chaque instant préservé ?
Première liberté,
Après la vie sévère,
Je ne pouvais qu’exulter,
Je me trouvais légère !
Tes brasseries ouvertes
Sur les places bruyantes,
Tes plantations vertes,
Et tes salles géantes
De cinéma, modernes ,
Aux affiches dessinées.
Ici, rien n’était terne,
Ô ! J’étais prédestinée
A aimer l’exotisme.
Quand près des fondouks, passant,
Je voyais l’héroïsme
Des porteurs, charges pesant
Sur leur dos, sacs de graines
Ou autres denrées sèches.
Pour eux pas de migraine,
Ils étaient dans la dèche…
Un beau parc de verdure
S’étendait dans ta ville,
Au lycée, le murmure,
Tuiles vertes qui brillent,
Ses galeries donnant sur
Les cours à ciel ouvert,
Légers bosquets près des murs.
Ah! On dresse le couvert
A l’internat-cantine,
Une odeur flotte dans l’air,
Venant des cuisines.
Du piano, la leçon
Résonne dans ma tête,
M’offrant une façon
D’être un peu moins bête…
Bâtiments municipaux
De blanc vêtus, la place
Portant leur nom, un drapeau
Au faîte de terrasse…
Les sirènes des bateaux
Du port grouillant de monde,
Et de l’océan , les eaux
De couleur profonde.
Blanches mosquées superbes,
L’appel à la prière,
Clamé de son haut verbe,
Effaçait la misère
Au fond des bidons-villes;
Sillonnés par les gosses,
Qui restaient sans asile,
Courant de plaies en bosses…
Et la rue Raymond Monod,
Dans ma chambre modeste,
Sûrement pas un cadeau,
Mon âme lâchait du lest…
Sur la corniche, le soir,
Toute boîte de nuit,
Alouette du miroir,
Se révélait ennoblie…
Mes toujours maigres repas,
Ou pas de repas du tout,
Je ne me plaignais pas,
Préférant être partout.
L’épicier “de mon coeur”
Installé près de l’entrée,
Ouvrait du crédit, bonheur !
A cliente attitrée.
Il “m’ôtait des épines” :
Du thon à l’huile-piment,
Conserve de sardines.
Je mangeais stoïquement,
Des spaghetti sans beurre,
Nul besoin de régime.
J’étais toujours à l’heure
Au point de vue estime :
Je mentais pour mes menus,
De bien pauvres mensonges
Qui restèrent inconnus,
Idiot ! Quand j’y songe !
Je n’avais que dix huit ans,
Aussi pour tout bagage,
Mon air réservé, d’autant,
Qu’il fallait du courage
Pour vivre seule ! Pourtant,
J’ai assumé. Liberté,
Je t’aime et aimée tant,
Tu es ma priorité !
©
Belle Casablanca, la ville blanche, si énigmatique, si belle, je vous rejoint. J’aimerai me glisser dans vos mots et voyager la bas…
Merci de ce voyage dans ce pays des milles et une beauté.
Anne
Casablanca apparaît sous ses différentes facettes dans votre poème. Qui dit liberté dit choix, assumés. Ils vous ont amené jusqu’ici et votre chemin vous a permis de rédiger tous ces écrits. Contente de pouvoir vous lire. Merci à vous :)
Que de souvenirs, Simone ! Merci pour le partage de ces belles images, gravées en nous jusqu’à la fin de l’âge !