Un jour une lettre – Michèle Hirel

Comme chaque matin, elle ouvrit la boîte aux lettres et prospectus de sa vie et parmi ceux-ci une écriture droite, régulière et inconnue, retint son attention .. Marc H. . des flashs de jeunesse adolescente  dans le lycée avec la découverte des premiers émois, des regards furtifs échangés et des baisers chastes et doux. Interdite, elle tournait et retournait la lettre comme surgie d’un autre temps et jetée par un facteur pressé. Ces dernières années se déroulaient au gré de sa solitude imposée ; elle regagna le divan couleur espérance où désormais, seule, l’empreinte de son corps se formait et où, seule, elle confiait ses soirées au dit “petit écran” réceptif aux longues heures vides ; heureusement deux jolies boules noires et blanches de matous la gratifiaient de leurs caresses et regards d’amour et s’imposaient quand leurs fines sensations détectaient sa détresse. Fi de cette libération de la femme, avant elle se sentait entière et protégée et surtout vivante.  François … celui qui remplissait l’espace de tout son amour, qui concrétisa toutes ses attentes avec sa tendresse inégalée et sa présence fidèle. Et il lui donna leur fille adorée ; ils étaient si fiers et heureux de sa réussite mais le prix à payer en était cette longue distance entre eux pour un poste à la hauteur des diplômes. La fille de sa meilleure amie travaillait dans une boulangerie et la gâtait d’une ribambelle de douceurs, tout ce qui était bon pour la ligne ! Elle en vint à l’envier puis tout à coup, prit conscience de ses pensées égoïstes et se souvint qu’elle entendrait ce soir,  sa douce voix au téléphone ; elle aussi souffrait de cette éloignement.

Indécise et perturbée, elle posa la missive sur le meuble de l’entrée, comme en attente,  mais malgré ses occupations et son obstination à bien remplir son esprit,  il était resté une trace de la matinée ; à chaque passage, son regard comme attiré par un aimant s’attardait sur le pli curieux et incongru. Irritée et déterminée, elle le rangea ,dans le courrier “à classer”, puis le ressortit, le rangea à nouveau et.. de guerre lasse, elle prit place entre Choupette et Ninette et ouvrit lentement l’enveloppe mystère ; à tout prendre ce n’était pas de mauvaises nouvelles mais comment avait-il retrouvé sa trace .. Au fil de la lecture, elle se  surprit à sourire et à s’étonner des hasards de la vie. ainsi donc, il était membre d’une Société protectrices des animaux, elle se rappela son gentil toutou Boris adoré… Ainsi donc, il l’avait reconnue, malgré les années, sur la photo d’un rassemblement général de la Société pour adorables minous où elle se rendait chaque semaine.  Quelle histoire de midinette pour la vieille dame respectable qu’elle était devenue !

Elle avait vainement tenté de se faire de nouvelles relations amicales. D’abord au foyer “des Anciens” (comme elle détestait ce terme) mais il était vrai qu’elle n’avait plus vingt ans, trente ans ou ….Cela semblait bien engagé et elle pensait s’adonner à son cher scrabble, amoureuse de l’orthographe depuis toujours ; elle fût ébahie de constater que les jeux de cartes prévalaient et que les femmes, les plus acharnées,  ponctuaient leurs essais d’exclamations bruyantes et répétées. Trois messieurs fort obligeants s’étaient unis pour lui expliquer les règles mais son esprit restait réfractaire à ces astuces compliquées ; pour lui faire plaisir une ou deux femmes avaient participé à son jeu mais leur dévotion s’était vite émoussée et elle se retrouva seule à sa table, comme un enfant puni dans son coin .. alors elle renonça.  Puis, les “restos du coeur” mais les horaires contraignants ne s’accordaient pas à son emploi du temps occupé par ménage, courses, rendez-vous médicaux devenus indispensables à son “bon maintien physique” et jardin, minous donc  renonçant encore. 

Et il se révélait que les êtres encore entourés d’enfants et de relations n’élargissaient guère leur horizon à de nouveaux amis, comme des cercles fermés. Un vrai parcours du combattant pour simplement briser le silence des heures ; cela avait souligné encore plus son isolement. Elle avait même envisagé un petit emploi mais qui était vraiment intéressé par les “vieux” .. euh, non dorénavant ils étaient appelées plus délicatement les “séniors” ! Il n’y avait donc qu’à ses rendez-vous près des chats qu’elle pouvait s’exprimer, mais pas toujours”, quand les bénévoles allaient et venaient .. alors, elle parlait aux matous mais elle avait beau tendre l’oreille, aucune amorce de conversation ,  que d’adorables miaous même si elle s’épanchait près d’eux comme une vieille folle !  “Solitude” .. tu peux brandir ton grand S avec ton Sablier des quatre Saisons où il faut Survivre dans le Silence et parfois les Sanglots (elle était assez fière de cette phrase qui  était venue un soir de mélancolie) ! 

Et voilà ce message incroyable comme pour combler un manque, devinant une attente .. maintenant deux visages s’interposaient dans ses jours. François ..  pourquoi donc es-tu parti si tôt, trop tôt, pour la première fois elle lui en voulût de l’avoir abandonnée fragile, à la merci d’une tentation.. une faille qu’elle découvrait telle une honte, une infidélité à commettre..  Et toi “autre”, vieux monsieur pourquoi me retrouver impunément et me faire remémorer les jeunes années enfuies.   La relative quiétude de sa vie s’était envolée et Choupette  et Ninette la regardaient arpenter sa maison en sentant comme une menace planer sur leur existence si bien établie.  Elle gardait la lettre comme une ennemie faisant basculer sa vie rangée mais dérisoire ou comme une amie voulant la guider vers un nouveau chemin.  Puis, elle se dit que François qui veillait sur elle, c’est sûr, dans son nuage bienheureux, ne voudrait pas la voir devenir encore plus desséchée, peut-être aigrie au fil du temps enfermée dans ce décor quasi monastique ; puis, elle se dit que ce vieux monsieur qu’elle voyait encore avec ses yeux rieurs et juvéniles  se perdait aussi dans un désert stérile.

Alors, un beau  matin où le soleil sembla jeter un rayon doré sur le bureau où elle s’installa , elle perçut dan le cadre du souvenir, le regard chaleureux de François et reçut comme un éclair d’encouragement, de connivence.. mais peut-être s’inventait-elle une raison .. mais elle se rappela son empathie jamais démentie envers le autres, ce don à discerner les malheurs et les tristesses ; elle l’effleura d’un tendre baiser mais non pas d’un baiser d’adieu car leurs âmes complices étaient unies à jamais .. Alors, elle prit sa plus belle plume et commença timidement (peut-être évoquer leur passion commune pour les animaux) ..  

Marc ….

Michèle HIREL

Michèle HIREL (14)

Je suis Minouchette et je me présente (un peu ..)

Je suis donc retraitée et j'ai travaillé essentiellement dans l'administration communale (Mairie)

J'aime : la lecture, le dessin et la peinture, le scrabble et les mots fléchés, et les promenades (en forêt près de chez moi... photos! ) et surtout LES CHATS (3)

Voilà Thaïs la petite dernière,1 Chimène (qui ne veut pas de thaîs !) 2 et Gros Câlin, agée de 17 ans, et qui en fait est à mon fils 3 (J'ai perdu mon superbe Diabolo, magnifique chat emporté en une semaine par une tumeur foudroyante) 4

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