Et je sais qu’un jour,
Pour moi aussi elle va venir.
Et lorsque son moment sera là
Mon moment du moins à moi
Le temps j’aurais voulu avoir eu
De tracer pour mes enfants
Un sentier
Si je n’ai pu tracer un chemin
Un chemin
Si je n’ai pas pu tracer une route
Vers une voie
J’aurais voulu avoir pointé
Tout simplement
Un poteau pour eux
J’aurais voulu avoir été
Pour mon fils et pour ma fille
Pointant vers un morne en haut
Le sommet d’une colline
Dans mes vallées
Et sur les hauteurs de mes collines
Un écriteau pour indiquer
La voie de la vie
Le sentier de l’humilité
Qu’est la vallée
Quand mon moment sera venu
Mon moment à moi
Si à tout j’avais failli
J’aurais voulu que
Le fumier de mon instant
Fasse germer et vivre
Dans la terre de leurs cœurs
Des grains que j’aurais en vrac jetés
Et que rien ne se soit perdu
Dans le sol de leur âme
Quand mon moment sera venu
Et que s’éteindra ma lampe
Mon manchon percé par la nuit
J’aurais voulu que sa cendre
Soit pour eux comme l’engrais
Du fumier d’une bûche de bois
Qui aura brûlé et éclairé
Au pied de jeunes plants
Elle vient vite la nuit
Elle avance sans bruit
Et quand on entend
Le vacarme de ses pas silencieux
Et de ses gros souliers de soldats
C’est qu’elle est déjà entrain de s’en aller
Avec ses pilonniers qui nous pilent
En pâte dans son mortier qui raffine
Et nous transforment en fumier
Avec ses mutualistes ses équipiers
Les vers et les vermines
Qui veulent se régaler.
Elle vient vite. La mort.
Vite la mort est arrivée.
©Lucienne Anku. Mai 2015 (extrait d’un poème d’hommage à ma mère)