Tourmenté par des tours qui mentent, par des pendables qui balancent leurs ombres au vent du jour levant, j’avance péniblement dans cette existence, abandonnant dans des lieux et quartiers, des morceaux de moi pour finir par n’exister que dans la mémoire de celles et ceux qui m’auront vu passer, sans comprendre, à peine approché, cet être que je fus.
L’Oubli a toujours été mon tombeau. Je rêvais d’être, je ne suis devenu que ce type en marge d’une société qui n’a pas voulu de moi et ne m’a laissé aucune place, alors je l’ai prise. Même si pour cela des victimes paieront une ardoise qui n’est pas forcément la leur, mais qui par leurs crimes impunis rejoignent cette grande cohorte fantôme composée de milliers d’individus qui cachent leurs vraies natures, leurs vrais penchants derrière le masque de la bienséance. Il vaut mieux les laisser vivre que de briser la vitrine des convenances. Le silence est d’or et permet à l’homme de l’Ombre, le visage confondu avec l’obscurité de pénétrer tous les antres, toutes les demeures, toutes les chambres. Derrière les murs se murent les lèvres et aucun mot ne sort de sous les draps. La peur de la foule vindicative est plus grande que celle du destructeur, de la destructrice. Il vaut mieux, alors, se pendre pour ne plus traîner son propre poids et disparaitre pour que cette douleur ne détruise le peu d’humanité qui subsiste encore en cette carcasse. Mais j’ai préféré vivre pour punir celles et ceux qui se croient impunissables.
Voilà pourquoi ma voie, voilà pourquoi mon choix. C’est un homme. Couché. C’est un homme qui a été mis à genoux, la gueule d’un canon noir à portée de tempe ; la croix au travers de la recherche et la connaissance pour le faire abjurer ; ce sont des violences commises au nom de ; c’est la volonté cassée pour faire taire les voix contre ; ce sont des notes qui traversent le Temps. Tout cela pour un pouvoir, de l’argent, des minerais, une puissance.
C’est une femme. Couchée, mise à genoux pour la faire renoncer ; pour lui montrer qu’elle n’est rien, même pas humaine ; qu’elle ne peut défendre aucune cause ; qu’elle ne peut être que mère et adorer son enfant, même si c’est un monstre.
C’est un(e) enfant. Couché(e), et qui pleure, la nuit, seul(e) et sans repères. Contre sa parole, le silence reste d’or pour éviter l’opprobre et les regards en biais des autres, comme si cela ne pouvait pas leur arriver, à eux ; c’est une main adulte qui claque et qui empêche la voix de s’exprimer ; c’est la non reconnaissance d’être comme un jeune animal, tout juste une caresse dans la tignasse.
Pour tous ces tourmentés qui n’ont jamais parlé, moi, j’ai décidé de pointer ma mire vers les véritables responsables. Voilà ce que je suis !
Extrait de Assis par Benoit Deville
J’ai aimé te découvrir de ligne en ligne… de mire !
Bienvenue Benoit et merci pour cette introduction extrait de votre ouvrage.
Félicitations pour votre parcours et vos ouvrages que nous avons hâte de découvrir.
Bien à vous,
Alain