Un mariage réussi… – Christian Satgé

Petite fable affable

On s’agite dans les haies séparant champs
Et chemin. C’est un très grand jour pour sa faune.
Un jour de fête, de festin et de chants :
Miss Campagnol épouse un joli béjaune !
Tout le terrier grouille de gens affairés
Pendant qu’avec sa maman, la demoiselle
S’apprête pour la cérémonie, dorée
D’atours. La mère rappelle à la donzelle :
« À mari ventru, femme jamais cornue !
Tu comprendras très vite pourquoi, ma fille.
C’est la seule chose à savoir, fort connue
D’ailleurs, pour que rien, non jamais, ne torpille
Ton mariage à n’en faire qu’oripeaux,
Comme pour le reste, copie bien ta mère :
Époux repu, ma fille, est paix et repos
Et le secret pour n’être jamais amère. »

Ces épousailles furent grandioses.
Dans les haies séparant les champs du chemin,

Tout être gîtant là, en un tournemain,
Fut convié. Nul ne fut oublié, chose
Rare chez qui aime à s’entre-dévorer
Comme ces bêtes-là. Depuis ce jour faste,
On n’est que compliments, et mots enthousiastes,
Pour ce couple qui semble tant s’adorer.
Dans le voisinage, cela fait contraste !

On hume, dans les haies séparant les champs
Du chemin, des plats dont elle le sustente.
Son mari prévenant n’est jamais méchant :
Il comble toute sa vie et ses attentes.
Son croqueur d’épi, si replet désormais,
N’a jamais cherché à prendre une maîtresse.
L’époux épais ne le peut : si le fumet
D’autres mets l’attire, déplaît fort sa graisse ;
Et, quand il fait la sieste pour digérer,
De sa fidélité étant bien certaine,
Comme sa mère,… elle part pour s’aérer
Et courir, loin du terrier, la prétentaine !

Messieurs, qui êtes choyés sans répit,
Alors que si peu sont heureux en ménage,
Ne cherchez pas à savoir pourquoi : dépit,
Douleur et rancœur pourraient vous rendre volages !

© Christian Satgé – janvier 2014

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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