LI – Marie-Philippe, l’ange blond
Il était une muse qui laissait en vous une trace indélébile, telle une apparition angélique. Elle se faisait appeler Mariephi, mais se prénommait Marie-Philippe. Elle appartenait à cette rareté de femmes qui, sans le chercher, attirent tous les hommes, comme la lumière attire les papillons, mais face à elle les hommes, se mettaient à débiter n’importe quoi tant toute leur attention était phagocytée par leur regard admiratif. C’est vrai qu’en sa compagnie on se sentait flotter comme dans un rêve, mais Marie-Philippe inspirait aussi un profond respect, celui des citadelles imprenables.
Lorsque je me suis assis face à elle dans une crêperie du quartier Montparnasse, elle fit disparaître tout le restant de la tablée, soit une douzaines de têtes. C’était comme si nous nous étions donné rendez-vous, alors que nous ne nous connaissions pas. Au spectacle de la comédie humaine, je me régalais en voyant un homme s’escrimer à se rapprocher d’elle qui restait imperturbable, telle une divine statue de marbre. Je pense qu’il n’y avait nul doute pour elle : elle était la plus fascinante de toutes les blondes et devenir la force centrifuge de toute une tablée lui était devenu une évidence ni contournable, ni désagréable. En toute simplicité et sans charger mon discours de compliments façon tarte à la crème, une discrète complicité se noua entre nous. Je pense qu’elle a su lire une certaine innocence dans mon regard dénué du tout esprit de convoitise. Cette complicité ne fit que se confirmer de soirées en week-ends. Au point que Dominique, l’homme le plus aimanté à Marie-Philippe, finit par me dire renoncer à la conquérir et que j’avais bien de la chance. C’est à ce moment là que j’ai pris conscience que je jouais le rôle du pare-feu de mon ange blond. J’étais au plus proche d’elle, mais sans chercher à la faire mienne, demeurant dans la contemplation fleurant bon la vénération céleste.
Dans mes souvenirs indélébiles, je citerai notre journée à Orléans et notre dialogue spirituel une fois isolés dans une chapelle de la cathédrale. Elle m’y avait fait la promesse de me revoir pour prolonger cet échange. Nos soirées au café-restaurant du 11 bar furent aussi source d’osmose féerique, surtout quand je l’ai accompagnée à la guitare le temps qu’elle chante face à moi « Une femme avec toi ». Marie-Philippe avait le timbre et le look de la superbe chanteuse Lisa Ekdhal, ce qui n’est pas peu dire, et que je n’ai pas manqué de le lui partager. Elle et moi étions de toutes les fêtes, comme celle de l’anniversaire de sa copine Corinne, Cocotte pour les intimes. Elle y a encore chanté avant de danser avec moi des jerks endiablés. Et peut être un discret soupçon de slow sans lendemain.
De tablée en tablée, la voir se réjouir faisait tout mon bonheur. Elle était la perle précieuse de tous les menus festifs. Pour moi, c’était le reste du monde que reflétaient ses prunelles et elle m’en faisaient précisément oublier le reste du monde tant je me noyais dans son sourire.
Nous programmions l’un ou l’autre des nuits parisiennes à vélo, dont l’une nous donna l’idée de monter dans l’ascenseur de la tour Montparnasse, un bolide qui nous propulsa à son dernier étage avec à peine le temps que nous regards s’y croisent et s’y fixent. Ayant tout Paris illuminé sous les yeux sur la terrasse de la tour, je me suis rendu compte que j’éprouvais la même félicité quand j’admirais Marie-Philippe. Cette nuit-là, j’étais doublement gâté de me délecter des deux en même temps.
Je suis intimement convaincu que l’infini respect que je lui portais aboutit à ce que notre relation ne prit jamais fin, même si elle devint peu à peu moins incarnée. Le temps finit par avoir raison de ses meilleurs intentions et de sa promesse cathédrale, mais nous échangeons toujours régulièrement, avec, cerise sur le gâteau, des bisous virtuels grâce aux réseaux sociaux. Qu’espérer de plus d’un ange blond intouchable ?
L’histoire unique d’une complicité homme – femme, toute en subtilité et en finesse! La joie, l’innocence et la spiritualité étant au rendez – vous!