Saint-Malo
Le soleil se couche sur la cité corsaire, des chants marins résonnent au loin, accompagnés par les cris de quelques cormorans recherchant des reliques de poissons.
Comme des sentinelles, les ombres des remparts veillent sur la cité corsaire depuis la nuit des Temps, sous l’œil de la statue de Surcouf, dominant les remparts.
Plus loin, la rue du chat qui pêche..
Dans les tavernes des alentours, ont refait le monde. Un vieux moussaillon tombé dans une barrique de chouchen, jure par tous les dieux, qu’il a vu une sirène, un soir entre deux rochers.
Au comptoir, Yann le timonier, explique à des touristes, que la tradition voulait qu’un marin victorieux au passage du Horn, puisse porter un anneau en or sur son oreille gauche, car c’est de ce côté que l’on longe le cap lors de la traversée d’ouest en est. L’autre privilège était de pouvoir dîner avec un pied sur la table, la possibilité d’y mettre le deuxième étant réservé aux marins ayant également passé le cap de Bonne-Espérance. Une autre coutume veut aussi qu’un marin ayant passé à la voile les trois caps (Horn, Leeuwin et Bonne-Espérance) gagne le privilège de pisser et de cracher contre le vent pour remercier Poséidon.
Ā la radio soldat Louis, fredonne des mots devenus mythiques : du rhum de la bière et des femmes Nom de dieu. Repris par deux vieux marins en manque d’aventure, leurs visages sont burinés par le soleil et le reflet d’eau.
Je sors de la taverne, l’air iodé remplit mes poumons d’un plaisir unique. Chateaubriand domine l’horizon, il est là devant moi, lui qui n’a voulu entendre que le bruit de la mer et du vent en dernière demeure, le voilà servi.
Saint-Malo s’est endormi, les touristes ont depuis longtemps rejoint leurs ports d’attache. Quelques rires résonnent du dédale des ruelles acescentes, je ferme les yeux et me laisse bercer par le cliquetis des manilles, qui claquent sur le mât du renard, dernier bastion de Surcouf.
Je m’assois au bord de la grève, la tête de tourne, je lève les yeux, il est là devant moi, portant un costume du siècle passé. Le corsaire me nargue et sa mine patibulaire s’approche de moi dans des mots que je ne comprends pas toujours :
–Oh, écrevisses des remparts ! Je vais venir à l’abordage de ta barcasse pour venir dérober ce qui t’appartient. J’ai vu ton sabre flibustier, il me plaît bien, ton canon est aussi de bon diamètre, il doit tirer comme nul autre ! Que m’offres tu gibier de potence ! Petit moussaillon tu vas trépasser aux pieds de tes murailles. Sais-tu, celui qui pille avec un petit vaisseau se nomme pirate, celui qui pille avec un grand navire s’appelle conquérant, allez moussaillon vient donc !
La tête me tourne , je ferme de nouveau les yeux, puis, je regarde le cotre du corsaire devant moi, le pillard des mers a disparu.
Je me lève avec une douceur dans l’âme, ressourcé par ce lieu magique.
Si vous visitez les remparts de nuit, il se peut que vous entendiez le claquement d’une jambe de bois ou le soupir de quelques coquins se noyant dans moult plaisir avant de reprendre la mer.
Il se dit, il se dit.. mais cela est une autre histoire.
©Anne Cailloux 2017
Merci Anne pour cette belle, sympa et parfois mystérieuse histoire belle continuation.. J’ai aimé ma lecture.
Votre joli texte me donne envie d’aller visiter Saint- Malo et ses remparts…
et écouter toutes les histoires et légendes contées par les vieux marins !
Merci Anne
Chantal