Le bélier et les limiers – Christian Satgé

Petite fable affable

Monsieur du bélier ne comptait plus les ans,
Ni les souvenirs de ses vertes années,
Et badait aux jours filant comme alezan.
Il vivait quiet et coi, bien encabanné
Avec sa “Bêelle” moitié de toujours
Qui continuait à illuminer ses jours.
Mais ce soir-là notre bélier vit le loup
Courant à la curée dans son poulailler.
Pour qu’on prenne sur le fait ce filou,
Il téléphone aux limiers sans traînailler,
Ceux de chez lui sont beaux et aimables chiens
Qui n’ont rien à voir avec des miliciens :
« Maître-chien, on me pille. Dépêchez-vous :
Un loup ravage mes poules et leurs œufs !

– Le malfaiteur s’est-il introduit chez vous ?

– Que non ! – Bon, enfermez-vous chez vous, Monsieur.
Nous prendrons votre déposition demain ;
Pour l’instant, je n’ai personne sous la main. »

Bélier raccroche mécontent : le perdreau
L’a cru tombé du dernier jour où il plut.
Il rappelle ce cabot, calme sans trop :
« C’est encore moi : ne vous inquiétez plus,
Celui qui volait ma volaille à grand bruit,
Je viens de le tuer. Allez, bonne nuit ! »
En cinq minutes, les poulets furent là ;
Et toute la meute des chiens renifleurs
Du pays !… Le loup fut pris sans tralala,
En flagrant délit par cette fine fleur.
Le chef des chiens interpella le bélier
L’air malengroin assez et le mot délié :
« Vous disiez que vous l’aviez tué, Monsieur ?!

– Et vous toutes vos unités occupées ?
Vous sembliez de mon problème insoucieux,
J’ai donc bien été forcé de vous duper :
“Quand la ficelle est grosse, disait mon Vieux,
Crois-moi petit, elle attache d’autant mieux !” »

© Christian Satgé – avril 2014

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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9 Commentaires
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Invité
5 novembre 2018 11 h 56 min

Bonjour Christian Satgé ! J’aime votre fable et la façon dont vous faîtes parler les animaux, votre morale. Je ne suis pas aussi éloquente que vos autres admirateurs, je ne suis qu’un bélier ! Bonne journée. Simone.

Hubert-Tadéo Félizé
Membre
4 novembre 2018 16 h 32 min

Intelligence du texte dans cette fable affable, où la police semble dupée, mais parfois, il faut utiliser des moyens illégaux pour obtenir une écoute de leur part, toutefois, attention que cela ne se retourne pas contre ce pauvre bélier. Fernand Raynaud, avait créé un sketch toujours d’actualité d’ailleurs : “le voleur de citrouilles”.

Amitiés poétiques.

Hubert-Tadéo

Invité
4 novembre 2018 15 h 55 min

C’est d’une bonne moralité à appliquer sans réserve si ce cas se présente chez moi.La police ne se déplace que si on parle des morts.Merci Christian.