Fin de Voyage – Dominique Capo

Au seuil de cette Citadelle qui n’a pas de nom et aux couloirs parcourus des vents glacés venus du Nord, je réalise soudain quel chemin il m’a fallu parcourir pour arriver jusqu’ici. Et tandis que mes pas me conduisent aux abords de ses portes serties d’or et d’argent, je ne peux m’empêcher de m’émerveiller devant toutes ces statues de pierre monstrueuses qui ornent ses fortifications. Combien d’hommes et de femmes ont échoué devant elles ? Combien d’entre nous ont failli au contact de leurs enchantements ? Le silence alentours résonne encore des cris horrifiés issus de leurs saisissements. Car nulle créature enfantée par ce monde – et lié à lui par les mille serments engageant ses Enfants – n’a la capacité d’incarner leur anéantissement.

Or, moi qui ne suis qu’un Être destiné à être annihilé, jamais ceux qui m’ont jadis enseigné ; à faire fi de mes envies pour me consacrer à ceux qui m’ont permis ; ne m’ont appris à éliminer cet Ennemi qui me poursuit. Alors, aussi, si je suis cette Barbarie dont je suis le fruit, je ne peux me mesurer à ces vils étrangers qui ont fui le pays ; des songes aboutis pour pénétrer dans ces lieux interdits ; où règnent en maîtres fureur et folie.

De fait, bien qu’aujourd’hui je me tienne devant lui, ce Donjon honni et dévoreur de nuits ; est arpenté de ces Sentinelles que j’ai toujours souhaité anéantir. Et tandis que leurs cris sont appauvris par les ombres de mes rêves inassouvis, je m’appuie sur ces derniers pour les affronter. Utilisant ainsi cette faiblesse pernicieuse instillée par ceux qui m’ont sorti ; de cet Univers d’eau et de feu, de terreur et de bris ; pour arracher à ces Démons qui ne m’ont pas encore dépecé, un peu de ce précieux temps qui m’est imparti. Pour secourir celle qui m’a montré il y a dix-mille ans d’ici ; les Secrets de son cœur endeuillé par les tourments de la vie.

Et maintenant que je franchis le seuil de cette Citadelle qui n’a pas de nom, que j’avance au plus profond de ses couloirs sans fin, que je dévale ses escaliers tortueux; et que j’explore ses salles ensevelies ; sous des tonnes de poussière, et aux horizons perdus ; je m’accroche au Souvenir de ces instants passés en ta compagnie. Puisque ce sont eux qui ont détruit ; illusions et songes d’un dément qui n’a obtenu ; que l’autorisation de mourir pour celle qu’il a choisi…

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