Chants champêtres – Christian Satgé

 

Belle endormie, près du bois et loin du bruit,
Une naïade se noie dans la nuit,
Bercée par le ruisseau qui, tout doux, murmure
De racines amères en ronces à mûres.
À son chant boivent le chêne et le roseau,
S’abreuvent à peine biches et oiseaux.

Elle dort, pour l’été ou l’éternité,
Nue, enveloppée d’un silence agité
Par la barcarolle des branches d’un saule
Qui pleure sur un miroir où se trantole
Une lune inconsolée en œil plissé.
Sélène y grave un éphémère abc
En traits cerclés, en points, en lignes timides
Où on pourrait lire les avis du Ciel
Si ce petit jeu n’était artificiel
Aux yeux de tous ceux que les Cieux intimident.

Au loin, le vent susurre sa mélopée,
Aux bosquets qui sont les îles découpées
Des champs herbeux, ondulante mer en houle.
Là, Philomèle vocalise et s’écoulent,
En écho, ses trilles, mourant en lambeaux.
Jusqu’au seul vrai repos, celui du tombeau
Et prise dans les rets du sommeil, ma Nymphe
N’entend pas les chants suaves de la nuit
Que soutient tout insecte discret qui bruit,
Attendant les larmes d’une aurore lymphe.

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© Christian Satgé – décembre 2011

 

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Christian Satgé

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Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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5 Commentaires
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Marie Combernoux
Membre
28 juin 2018 9 h 36 min

Très beau poème Christian, on oscille entre le sommeil et la mort : ” Belle endormie ” “pour l’été ou l’éternité” dis tu…. Ce beau poème me fait énormément penser au “dormeur du Val” de Rimbaud…..! Bravo !
Amitiés

MARIE

Invité
27 juin 2018 17 h 11 min

c’est grandiose, on a envie de se coucher dans l’herbe et ce ne plus se réveiller.