C’est la fin des vacances et de ce qu’on ne parvient pas à vivre. Qu’est-ce qu’on voudrait vivre ? On ne le sait pas vraiment.
Rien ne va plus. Les ministres ont enlevé leur survêtement et se préparent, sur la ligne de départ, à accomplir un grand marathon pour la défense de nos libertés. Des badauds de plus en plus stressés se sentent pressés de porter leur fardeau. En quantité astronomique, de la poussière éclate en images d’étoiles. Notre galaxie se nomme toujours la Voie Lactée. On filme en permanence les satellites artificiels depuis la Terre, on peut les observer à l’écran dans leurs moindres détails.
Le vin se change en eau dans les bouteilles. Les arbres sont bleus, l’herbe est rouge, les rivières sont jaunes, les maisons sont noires, le ciel est tout vert. On ne regarde plus la télé, les vaches ne regardent plus passer les trains, les enfants ne voient plus les avions qui sont au ciel.
Les panneaux de signalisation ne sont plus à leur place. La grande hêtraie n’est plus qu’une clairière à chardons pleine de fondrières, l’oliveraie s’est transformée en une horrible roncière. Pour abréger le cours de sa vie, la Meuse s’est jetée dans l’Escaut près de Termonde. On devrait garder son sang froid même si on a le sang chaud. Les moutons pourchassent le tigre tandis que le loup se fait agneau. A présent le rocher de Gibraltar touche à la côte africaine.
Les mots ne veulent plus appartenir à la langue, ils se sentaient coincés dans une cangue. Mais la langue ne sera plus là pour les assembler.
(Chênée, le 14/2/2016)