À lit ouvert – Christian Satgé

Modeste page du pageot car la nuit porte sommeil !

Puisque, dit-on, l’avenir appartient
À ceux qui se lèvent tôt, je ne tiens
Pas, moi qui ne suis que souvenirs et mémoire
À en priver les heureux élus que les Moires
Destinent à ne pas rester têtards.
Aussi je continue à me lever très tard.
Mes ancêtres étant, je crois, tous de bonne couche,
Le Roi-Sommeil en est – On n’est pas des Manouches ! –
On a toujours été dans de beaux draps,
Aimons à y rester, faire du gras.

On est devenus alcôviques anonymes
Et roturiers du pucier,… Notre crime ?
Le pieu, le lit, un fort pieux délit,
Qui en grabat à plus d’un qui le lit !
En bon matelots du matelas, on y rime
Comme baladins du baldaquin qui s’animent
Pour bien dormir sur leurs deux oreillers.
Plumitifs de plumard ou éveillés
Au coin du feu, nul chez nous, jamais ne tire
La couverture à lui, même quand il s’étire !

Depuis le berceau, je roule en pageot
Et défends, en baillant comme un barjot
Et pas qu’aux corneilles, ma très indispensable
Et chérie liberté de pioncer, le sable
Du nocturne marchand, homme de paix,
Berceur d’illusions qui me paie
En monnaie de songes et m’assieste sans trêve
Dans ce que je n’fais pas, étant toujours en rêves !
Le dodo, cet animal disparu
Revit en moi, de fatigues recru.

Vous aurez beau, l’ami, me tirer les couettes,
Je lanternerai car, c’est ça qui est chouette,
Je n’suis pas une lumière, hélas !
Mon sceptre est le roupillon, en roi las
Des ruelles et des carrées ou je somnole
Haddock de ces paddocks sans nulle gaudriole.
Paillasse est ma maison non mon nom,
Et elle fera, sans doute un jour, mon renom.
Ah, tout cela serait bel et bon si, gageure,
J’y pouvais dormir, mon bon Morphée, quelques heures…

© Christian Satgé – juin 2016

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Christian Satgé

Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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Invité
7 février 2019 19 h 19 min

Bonsoir
Ce texte m’a fait sourire moi je me lève tôt sourire
La nuit parfois se peuples de rêves et aussi de vers qui gambade dans ma tête en attendant sa muse
cette poésie est à lit ouvert ou à ciel ouvert sur le fil de tes vers un plaisir de te lire cher Christian
douce soirée amicalement