Aux filles de L’eau – Christian Satgé

Petite fable affable

Sans paraître plein d’inanité,
La faune des eaux de cette plage
Ressemblait fort à l’Humanité :

L’écrevisse, au bout de son bel âge,
N’ayant pourtant jamais marché droit
Se voulait pucelle et qu’on le croie ;

Une langouste qui se voulait dame
À la fleur de ses jours, fort vous blâme
Si ses rides gommées, non sans art,
Et ses jeunes amants de hasard
Ne vous la font croire jouvencelle ;

Crabe coupante et cassante, icelle,
Comme sa pince, se croit, sans feinte,
Fort aimée alors qu’elle n’est que crainte ;

Chez les crevettes, où tout est bon
Sauf la tête, on trouvait un Platon,
Un Aristote, un Kant, un Érasme,…
Alors que tous ces sots ectoplasmes
N’en savent pas plus long qu’A.B.C.

La tortue avançait, front baissé.
Elle était la risée de bien des rosses
Qui la trouvaient bien lente et trop grosse ;

Et la coque, en sable se terrait,
Car moins belle qu’huître qui serrait
Entre ses dents de si belles perles.

Ce rivage était un Clochemerle
De quolibets et de faux semblants
Où chacune jouait les Jean-le-blanc.
Amie, ne sacrifie jamais l’être
Au vain médire ni au paraître !

 

© Christian Satgé – février 2014

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Christian Satgé (834)

Obsédé textuel & rimeur solidaire, (af)fabuliste à césure… voire plus tard, je rêve de donner du sens aux sons comme des sons aux sens. « Méchant écriveur de lignes inégales », je stance, en effet et pour toute cause, à tout propos, essayant de trouver un équilibre entre "le beau", "le bon" et "le bien", en attendant la cata'strophe finale. Plus "humeuriste" qu'humoriste, pas vraiment poétiquement correct, j'ai vu le jour dans la « ville rosse » deux ans avant que Cl. Nougaro ne l'(en)chante. Après avoir roulé ma bosse plus que carrosse, je vis caché dans ce muscle frontalier de bien des lieux que l'on nomme Pyrénées où l'on ne trouve pire aîné que montagnard.

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4 Commentaires
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Fattoum Abidi
Invité
Fattoum Abidi
9 avril 2018 12 h 33 min

Bravo Christian très beau texte, on oublie souvent le fond de la chose, de la personne et de l’être en général, et on se fie au paraître sont-ils les yeux qui succombent au paraître par vice, par habitude ou par éducation?

ChanTal-C
Invité
ChanTal-C
8 avril 2018 13 h 36 min

Ah ! le paraître prend trop souvent la place….de l’être…
Merci Christian de le dire et de l’écrire ici !
Amitiés

Chantal